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LE VASE DE SOISSONS
Clovis ne tarda pas à justifier la confiance dont il était l’objet. Quoique païen, il était bienveillant pour les catholiques et prenait volontiers conseil des évêques. Mais le jeune chef rêvait de conquérir de nouveaux territoires.
Sa première expédition fut dirigée contre le général romain Syagrius, établi à Soissons. La bataille fut acharnée, mais la furie franque eut raison des soldats de Rome; Soissons fut pris, et, à sa suite, nombre de villes capitulèrent devant le vainqueur. Quant à Syagrius, épouvanté, il s’enfuit jusqu’à Toulouse, où il demanda protection au roi des Wisigoths Alaric. Avec lui, disparaissaient les dernières traces de la domination romaine (486).
Après cette bataille, les Francs avaient récolté un riche butin. C’était la coutume du temps d’autoriser le pillage des villes vaincues. Le butin était divisé en parts que les soldats tiraient au sort. Malgré les ordres de Clovis, ses guerriers ne respectèrent pas les biens d’Eglise et dérobèrent un vase précieux destiné au culte. L’évêque saint Remi, profondément affligé par cette profanation, dépêcha un messager vers Clovis pour le prier de lui rendre le vase. Le jeune roi accueillit avec déférence l’envoyé de l’évêque, et l’engageant à le suivre jusqu’à Soissons:
— Je ferai alors ce que me demande Remi, promit-il.
L’heure du partage arrivée, Clovis, désignant le vase sacré, dit à ses soldats :
— Mes vaillants, je vous demande de m’accorder ce vase en plus de ma part de butin. Tous, d’un commun accord, abandonnèrent leurs droits, mais un Franc, indiscipliné et jaloux, levant sa francisque, en frappa le vase qui vola en éclats; puis il s’écria :
— Tu n’auras rien, ô roi, que ce que le sort te donnera !
Clovis supporta cette insulte en silence; il ramassa les débris du vase et les remit au messager de l’évêque. Un an s’était écoulé et chacun, sans doute, avait oublié l’incident, lorsque le roi, passant la revue de ses troupes, s’arrêta devant le soldat rebelle et, lui reprochant la mauvaise tenue de ses armes, il lui arracha sa francisque et la jeta sur le sol. L’homme se baissait pour la reprendre, lorsque Clovis, saisissant sa hache, lui fendit la tête en disant:
— Qu’il te soit fait comme au vase, l’an dernier, à Soissons.
Cette exécution remplit les assistants de crainte : la punition était rude, mais il faut se souvenir que Clovis était barbare et païen.
Après la prise de Soissons, qui devint sa capitale, le roi franc continua ses conquêtes. Il possédait alors toute la partie située entre la Loire et le Rhin. Les évêques espéraient qu’un jour, s’il se convertissait, le vaillant souverain, si déférent pour eux, les aiderait à combattre le double fléau du paganisme et de l'arianisme qui dévastait le pays. Leur espoir ne fut pas déçu, mais pour arriver à ce grand résultat, Dieu allait se servir d’une femme.
SAINTE CLOTILDE
A la cour des Burgondes, vivait une jeune princesse d’une grande beauté. C’était Clotilde, nièce du roi Gondebaud. Restée fidèle à la vraie foi au milieu d’un peuple arien, elle donnait l’exemple de la plus haute vertu. Sa réputation étant parvenue jusqu’à Clovis, il désira l’obtenir pour épouse; il envoya donc demander sa main à Gondebaud. Celui-ci — qui, au dire de plusieurs historiens, avait fait périr les parents de Clotilde, — n’osa refuser son consentement; il espérait par ce mariage obtenir l’alliance du roi franc.
Clovis vint lui-même à la rencontre de sa fiancée et la conduisit à Soissons où le mariage fut célébré avec grande magnificence. Non contente d’obtenir de son époux l’autorisation de faire baptiser ses enfants, la pieuse reine ne cessait de supplier Clovis de renoncer à ses faux dieux pour embrasser la foi du Christ. Pendant plusieurs années ses prières furent vaines, mais, l’exemple de la vertu de Clotilde faisait impression sur le cœur du roi, le préparant peu à peu à entendre l’appel de la grâce.
BATAILLE DE TOLBIAC
En 496, une invasion des Alamans mit en péril les conquêtes des Francs ; et Clovis, uni aux Francs-Ripuaires, accourut pour leur barrer passage. La rencontre eut lieu près de Tolbiac. Tout à coup, et pour la première fois depuis qu’il les commande, Clovis voit ses soldats fléchir. En vain, il les soutient par ses appels et par son exemple, les Francs reculent! Mesurant les désastres qu’entraînerait une défaite, le vaillant chef implora ses faux dieux... Mais que peuvent pour lui ces fausses divinités ? La débandade continuant, les Alamans vont demeurer maîtres du terrain lorsque, soudain, Clovis se souvient des exhortations de sa pieuse épouse. Dans son désespoir, élevant ses bras vers le ciel, il s’écrie:
— O Christ ! toi que Clotilde assure être le Fils du Dieu vivant, si tu me donnes la victoire, je croirai en toi et me ferai baptiser en ton nom ! Ces paroles sont à peine prononcées que les Francs reprennent l’offensive et s’élancent de nouveau sur les ennemis qui s’enfuient en désordre, laissant leur roi parmi les morts. Clovis, déjà transformé sans doute, accepta la soumission des Alamans et fit la paix.
Par la victoire de Tolbiac était constituée l’unité franque, et l’aurore de la foi se levait sur la nation choisie qui devait être désormais la France, Fille aînée de l’Eglise.
publication de 1913
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