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5 H 10 : LES ALLEMANDS SIGNENT LEUR DEFAITE

 

C’est le 6 octobre 1918 que le chancelier allemand sollicita du président américain la conclusion d'un armistice. Foch fut chargé d'en négocier les conditions. Après quelques jours de consultations entre alliés, Foch fit savoir au haut commandement allemand que s'il sollicitait un armistice, les plénipotentiaires auraient à se présenter le 7 novembre sur la route de Chimay à la Capelle. Pendant ce temps, les hostilités devaient continuer. Le 7 novembre au matin, à 6 h 30, le général Debeney dont les unités poursuivaient leur progression reçut la communication suivante : "Les parlementaires allemands venant demander l'armistice se présenteront sur la route de la Capelle à partir de 8 heures". Vers midi, on apprit que les Allemands n'arriveraient qu'à 17 heures, et le premier qui apparut fut un lieutenant d'état-major précédé d'un trompette portant un drapeau blanc. L'officier déclara que les plénipotentiaires mettraient quelques heures encore à arriver en ce point des lignes françaises tenues en cet endroit par le commandant de Bourbon-Busset.

 

 

 

le 7 novembre 1918, des plénipotentiaires allemands arrivaient aux premières lignes françaises, prés de Haudroy (Aisne)

 

 

LES PREMIÈRES NOTES


Il était 19 h 30. Quand, dans la nuit tombée, sous une pluie fine, montèrent les premières notes du cessez-le-feu. Quelques instants plus tard, un convoi de cinq voitures arrivait, précédé d'un soldat portant un immense drapeau blanc. Sur le marche-pied de l'une des voitures, était monté le caporal-clairon Sellier, qui quelques jours plus tard, allait entrer dans l'histoire en sonnant « L'Armistice ». Bien qu'en retard, les plénipotentiaires allemands sont au rendez-vous de La Capelle. Il y a là le général von Winterfeld, ancien attaché militaire à l'ambassade allemande à Paris, le ministre Erzberger qui dirige la mission, le comte Oberdorff, le capitaine Vanselev et quelques experts.
De La Capelle, les Allemands sont conduits à Hombleuse. Là, on leur donne, suivant l'expression du général Debeney « Le pain et le vin du soldat». Il est minuit. Il pleut toujours. On se remet en route en direction de Treguier . Il est trois heures du matin.
— Où sommes-nous ? demande Erzberger.

— A Treguier, répond de Bourbon-Busset.
— Mais il n'y a personne ?
— En effet, répondit l'offfcier français. Jadis, il y avait une ville (note : de 5868 habitants). Elle a été détruite scientifiquement par les soldats allemands au moment du recul de 1917 et comme vous le voyez, il ne reste pas trace de maison. Il n'y a pas de maison, mais il y a encore une gare, et sur les rails, un train. Les Allemands y montent. De Bourbon-Busset s'adressant au général von Winterfeld lui dit :  "Cet entonnoir, c'est un obus à retardement qui a éclaté trois semaines après le départ de vos troupes. J'espère qu'il n'y a pas d'obus sous votre train !" Et, dans la nuit finissante, le train s'ébranle vers le rendez-vous fixé par Foch.
Le 8 novembre à 8 heures, le convoi de trois wagons stoppa dans la forêt de Rethondes. Un autre train l'y attendait. A son bord, Foch et l'amiral Wemyss, lord de l'amirauté et plénipotentiaire anglais. Les Allemands sont réveillés, et on les prévient que Foch les recevra dans son train à neuf heures.


SOIXANTE-DOUZE HEURES

 

C'est l'heure, l'heure de l'entrevue historique du train de l'armistice. D'un côté, Foch, l'amiral Wemyss, le général Weygand, l'amiral Hope. De l'autre, les Allemands. Ezberger en premier, prend la parole. Il dit qu'il vient au nom de l'empereur recevoir les "propositions des puissances alliées". Foch répond qu'il n'a aucune proposition à faire. Le comte Oberdorff exprime l'idée que le mot "conditions" conviendrait peut-être mieux. "Aucune condition non plus" , rétorque le maréchal. "Je ne suis, dit-il, autorisé à vous faire part d'éventuelles conditions, que si vous demandez un armistice. Demandez-vous un armistice ?"
— Oui, répond Ezberger d'une voix étouffée.

Le maréchal fait alors donner lecture par le général Weygand des clauses principales de l'armistice. A la lecture de l'article prescrivant "l'occupation par les troupes alliées des pays rhénans et des têtes de pont sur le Rhin", des larmes coulent des yeux du capitaine Wanselov... Quand la lecture est terminée, Foch prononce cette simple phrase : "Vous avez soixante-douze heures pour accepter ou refuser les conditions qui viennent de vous être lues. Les hostilités ne cesseront pas avant la signature de l'armistice."
Il fut décidé que la réponse allemande devait parvenir le lundi 11 novembre à onze heures.
Le 10 novembre à 19 heures, Foch faisait rappeler aux plénipotentiaires allemands la prochaine expiration du délai qui leur était consenti... Quelques instants plus tard, la note suivante parvenait à Foch : "Le gouvernement allemand accepte les conditions de l'armistice."
A 5 h 10, le 11 novembre, deux plénipotentiaires allemands apposaient leur signature sur le document. A 11 h le feu cessait de la mer du Nord à la frontière suisse.

 

 

ARMISTICE 1918 RETHONDES

 

 

Le lundi 11 novembre 1918 à 11 heures, le caporal Sellier sonnait la fin de la Première Guerre Mondiale.

 

 

ET DANS PARIS ILLUMINE, DORGELES CRIE "VIVE LES MORTS"

 

11 novembre, Foch, commandant en chef des armées alliées, roule vers Paris. Dans sa serviette : Le texte de l'armistice. Quelques heures plus tôt, avant de descendre du wagon historique, il avait dit à Weygand : "Je crois que ça s'est bien passé." Et voici la banlieue de Paris, déjà toute frémissante, car en fait, depuis la veille, on savait. Depuis le dimanche, la place de la Concorde était noire de monde et les gens avaient dormi là, alors que les drapeaux apparaissaient aux fenêtres. Des drapeaux ? Paris en avait fabriqué toute la nuit et les vendeurs avaient fait des affaires d'or. Le 11 novembre à dix heures du matin, ils valaient 3 fr. 90. A midi, 10 francs.
10 heures, au Ministère de la guerre à Paris. Sur le perron, Clémenceau attend le généralissime. Foch ne fait pas de phrases. S'adressant au chef du gouvernement, il lui dit simplement : "Voilà, je l'ai là..." A 11 heures toutes les églises de France se mettent à sonner, de Paris jusqu'au plus petit village. Dans toute la France, mais aussi, et pour une autre raison dans toute l'Allemagne.

 

Et Paris s'embrasse. Et Paris tout entier n'est qu'un immense baiser. On embrasse qui l'on rencontre, on embrasserait les bancs des boulevards, si de jolies femmes n'étaient pas assises dessus. Poincaré dira à Clemenceau (et pourtant les deux hommes ne s'aiment guère) : "Vous embrasser ? Soit. Je suis un immunisé. J'ai depuis ce matin, reçu le baiser de 500 femmes..."
En ce temps-là, il n'y avait ni radio, ni TV. C'est le directeur du "Gaulois", Arthur Meyer, qui eut l'idée" du premier transparent. Grâce à lui, tout Paris put lire bientôt sur un immense calicot : "L'armistice est signé ! Vive le Poilu ! Vive Clémenceau ! Vive Foch !" Le "Matin" quelques instants plus tard, fit de même. Dans ses Mémoires, le chef du corps expéditionnaire américain, le général Pershing écrit ceci : "Les passants semblent soudain électrisés, sautent de joie comme des enfants, courent comme des hallucinés, se serrent la main, se tapent dans le dos, s'embrassent et hurlent... » Dans les grands magasins, les vendeuses jettent à la clientèle les articles qu'elles étaient chargées de vendre, et sur les Champs-Elysées, des soldats américains tirent en l'air des centaines de coups de revolver. L'un d'eux déshabille un agent de police de faction près des boulevards et règle à sa place la circulation... Paris n'est plus une capitale : c'est une mer furieuse de joie. Le général Pershing mettra deux heures pour traverser en voiture la place de la Concorde. Des femmes, des hommes qui l'ont reconnu montent dans sa voiture et le général disparaît bientôt sous les occupants. Rue de la Paix, des soldats anglais montent sur les tables de café et déclament du Shakespeare... C'est la page bleue de l'amitié. Il en est une autre qui fut oubliée un moment. Au milieu de ces foules enthousiastes, il y a des milliers de femmes silencieuses. Des mères, des femmes en deuil. Près de la gare de l'Est, l'une d'elles se penchera vers son enfant pour lui dire: "C'est pour cela, vois-tu, que ton papa est mort."
Le grand écrivain français Roland Dorgelès, l'auteur des "Croix de bois", écrit : "Toute cette journée, je l'ai passée à hurler Vive les morts. La joie du 11 novembre, je savais le prix que d'autres l'avaient payée." L'avant-veille, le grand poète Guillaume Apollinaire était mort à 38 ans des suites d'une balle reçue en pleine tête dans les tranchées de Verdun. Ses derniers mots seront : "Une étoile de sang me couronne à jamais." Et la journée avance et c'est toujours le même cri : "Clémenceau... Clémenceau !" A 15 heures la Chambre des députés se réunit. Des crêpes (1) ont été déposés aux places des députés morts à la guerre...
Voici Clémenceau. Tout le monde l'acclame. Tout le monde, sauf deux députés socialistes : Renaudel qui plus tard allait mal tourner, et Longuet, directeur du "Populaire" et petit-fils de... Karl Marx. Clémenceau parle : "Le feu a cessé sur tout le front ce matin à 11 heures. J'apporte le salut de la France une et indivisible à l'Alsace et à la Lorraine retrouvées. Grâce à nos soldats, jadis les soldats de Dieu, aujourd'hui Soldats de l'humanité, la France sera toujours le soldat de l'idéal."

 

Le soir tombe sur Paris pour qui il est toujours 11 heures. Aux carrefours, c'est un festival de polkas, de valses et de lampions. Les chefs ? Foch est rentré chez lui paisiblement. Joffre est dans son salon, toutes lumières éteintes. Et pourtant, pour la première fois depuis des mois, l'éclairage des magasins fait comme une guirlande aux trottoirs. Sur la place de l'Opéra, on chante "La Marseillaise", "La Brabançonne", "The God Save the King" et le "Star spangled banner"...
Clemenceau, lui non plus, n'a pas quitté son appartement. Comme on lui demande de venir au grand gala de la victoire, il déclare : "Non je veux me reposer." Pourtant, il faudra qu'il y aille. Des centaines de milliers de voix le réclament. Il ira d'un air las. Il a déjà 77 ans. Difficilement, il accédera à sa voiture, porté par mille bras. Et soudain, une femme apparaît, poussant devant elle son mioche, et elle dit au Tigre: "Monsieur le Président, s'il vous plaît, embrassez le petit. Il faut qu'il se souvienne de vous."
11 novembre 1918, après tant de malheurs quand sur la souffrance des vivants et sur les millions de tombes, le caporal-clairon Sellier, très loin de Paris, sonna l'armistice aux avancées du front, il avait bien semblé à beaucoup de gens, que cette fois enfin, les épis allaient mûrir. Hélas !!! Péguy (2) ne pouvait pas savoir que jamais, non jamais, les blés ne seraient moissonnés.

 

Parce que, le même jour, un Allemand parfaitement inconnu écrivait sur son carnet de route : "Criminels, misérables, dégénérés. Plus j'essaye de me représenter l'événement monstrueux, plus je sentais mon front brûler de honte et de déshonneur. L'Allemagne a été poignardée dans le dos par les traîtres de l'intérieur." Il s'appelait Adolf Hitler.

 

Texte de L.Granger publié en 1968, dans un quotidien suisse, pour le cinquantenaire de l'Armistice.

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1 - Morceau d’étoffe noire porté en signe de deuil.

2 - Charles Pierre Péguy, écrivain et poète, né le 7 janvier 1873 à Orléans, est mort le 5 septembre 1914.

 

 

 

 

 

 

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CE QU ILS ONT SIGNE - LES CONDITIONS TERRITORIALES DE L'ARMISTICE ET LE FRONT LORS DE LA CESSATION DES HOSTILITÉS

 

La faible partie que les Allemands occupent encore du territoire français, la Belgique et le Luxembourg doivent être évacués. Nous allons occuper l'Alsace-Lorraine et la rive gauche du Rhin. Nous tiendrons trois têtes de pont : à Cologne, Coblentz et Mayence, et nous avancerons, sur la rive droite, dans un rayon de trente kilomètres au delà.

 

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11 AVRIL 1927 - LE WAGON DE L’ARMISTICE QUITTE LES INVALIDES PUR LA FORET DE COMPIEGNE


Le wagon de l’Armistice, le glorieux souvenir de la victoire, a quitté la place d’honneur qu’il occupait aux Invalides dans la cour Louis XIV. Il a fallu seulement quatorze heures à un détachement de trente-deux jeunes sapeurs du 5ème génie, commandés par le lieutenant Rosset, pour sortir la lourde voiture de l’immense cour où, depuis le 11 novembre 1919, elle se désagrégeait peu à peu, rongée par la rouille. Ces sapeurs posèrent rapidement une centaine de mètres de voie volante.

Dans l’après-midi, les ouvriers de la compagnie de transports Gary de Faviès, accréditée par la municipalité de Compiègne, déclavetèrent à l’aide quatre puissants vérins, les deux boggies du wagon, faisant glisser en même temps la carrosserie, qui pèse une trentaine de tonnes, sur deux immenses plateaux à roulettes.


Le wagon quittera les Invalides lundi 11 avril vers 10 heures, … pour être dirigé sur les ateliers de la Compagnie des Wagons-Lits, où il sera remis à neuf. Le glorieux wagon sera alors dirigé sur Rethondes et ira occuper l’emplacement même où il se trouvait quand l’armistice fut signé le 11 novembre 1918.

 

Publication d'avril 1927

 

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L'inauguration officielle s'est déroulée le 11 novembre 1927.

 

 

Le Wagon dans la Cour des Invalides à Paris et le Wagon à Compiègne

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LE CLAIRON DE L'ARMISTICE

 

Les Etats-Généraux de la France Meurtrie, qui se sont tenuss récemment à Versailles et ont réuni les déléguès de toutes les assocaitions d'anciens combattants et victimes deguerre, on montré un admirable exemple de ce peuvent la volonté, l'abnégation et le courage agissant pour une bonne cause. Les associations représentées avaient non seulement des intérêts diffèrents, mais certaines d'entre elles affichaient les opinions politiques les plus opposées. Cependant, l'entente entre tous est parvenue à se faire et le front unique a été réalisé pour la défense de tous ceux qui ont souffert au cours de la grande tourmente.

 

Cette unanimité a été symbolisée d'une façon magnifique. Le dernier jour des Etats-Généraux, les congressistes, en un formidable cortège, défilèrent dans les rues de Versailles, puis se groupèrent de nouveau au pied du château. Après un dernier adieu, émouvant et vibrant, de M. Poincaré, ils allaient se disperser lorsqu'une fen^tre du palais s'ouvrit, un homme apparut tenant à la main un clairon: c'était M. Henru Sellier, celui qui, en 1918, sonna le premier "Cessez le feu !" sur la ligne des tranchées françaises, au passage des parlementaires allemands. De l'instrument de cuivre Sellier fit jaillir le traditionnel refrain réglementaire : "Rompez les rangs !" sur les vingt mille congressistes assemblés devant lui et sur les deux mille drapeaux qui s'agitaient. Les Etats-Généraux de la France Meurtrie ne pouvaients'achever plus en beauté.

 

Publication de novembre 1927

 

 

 

 

 

"On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels" - Anatole France

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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