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L’olive est le fruit de l'olivier, un arbre fruitier caractéristique de la région méditerranéenne.
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LES OLIVADES
Qu'il en aurait donc des choses à dire s’il pouvait parler, le vieux moulin de M. Daudet! Il se tient toujours bien droit sur la colline de Fontvieille à la limite des plaines de la Crau et de la Camargue, sur les derniers contreforts des Alpilles. M. Daudet n’est plus là, et le sous-préfet ne s’en va plus aux champs.
Mais, tandis qu’en ce mois de novembre, le mistral renaît avec vigueur, transperçant les vêtements, coupant le souffle, les jeunes Arlésiennes ne passent plus leur temps comme dans la chanson à troubler les cœurs des garçons; les femmes de Fontvieille ont bien trop de soucis en tête! Ont-elles perdu leur beauté ? Certes non ! Elles sont toujours aussi attrayantes, grandes et brunes, le front altier sous leurs épais cheveux noirs, avec leur teint de brugnon doré et leur démarche élégante. On dirait des reines, mais ces reines, qu’il pleuve ou vente, travaillent durement! Ne leur faut-il pas, pour gagner leur vie (et la bien mal gagner) être dehors en toute saison, du matin au soir ? De juillet à septembre, c’est là-bas, sous un. soleil de plomb, la cueillette des haricots verts, puis des raisins de table, et enfin, d’octobre à janvier, ce sont les "Olivades". Le geste gracieux de cette cueilleuse d'olives saccomplit sous la bise glaciale des froids ma tires de Provence.
"Olivades" est un bien joli nom, pittoresque et poétique qui semble évoquer une joyeuse cérémonie folklorique ? Eh bien, détrompez-vous vite : il s’agit en réalité d’un dur, très dur labeur auquel sont astreintes toutes les femmes de Fontvieille, jeunes ou vieilles, qui, tout comme leurs sœurs des villes, doivent, lorsqu’elles rentrent fourbues, le soir, à la maison, recommencer leur deuxième journée de travail: préparer les repas du lendemain, faire leur lessive et tout le reste !
Eh oui, s’il pouvait parler, le vieux moulin de Fontvieille, il vous dirait comment se passent ces "olivades", il vous dirait comme il fait froid sous le ciel de Provence, le matin, quand la gelée blanche raidit les doigts qui doivent rapidement cueillir les olives et remplir les petits paniers que les femmes juchées sur des échelles attachent à leur ceinture. A midi, elles prennent leur repas sur place, et une bonne boisson chaude pour les réconforter ne serait pas de trop. Si la saison est bonne, elles travailleront jusqu’à la Noël, gagnant 80 francs de l’heure seulement ; aussi, réclament-elles 100 francs de l’heure pour ce travail pénible.
Mais 'en Provence comme ailleurs, les méfaits de la politique du Gouvernement Pinay se font durement sentir ; il en va pour les olives comme pour les autres produits. Quand les mères de famille, le cœur serré, se voient obligées de réduire la nourriture de leurs enfants, en raison du prix élevé des denrées les plus essentielles, à plus forte raison décideront-elles de se passer d’olives pour garnir leurs plats et d’huile d’olive pour assaisonner la salade.
Et pourtant, l’huile d’olives que fournit la Provence est une des meilleures du monde ; ce n’est pas l’avis de M. Pinay qui en fait venir d’Espagne des tonnages massifs, aidant ainsi Franco à se procurer des devises tout en ruinant une production française.
Il peut vous dire, le moulin de Fontvielle, à quel point les paysans aiment leurs oliviers, les taillent avec amour, se transmettent leurs secrets de père en fils, il peut vous dire aussi combien leur colère grandit de voir que rien n’est fait pour les aider ; dans l’état actuel des choses, il faudrait encourager la culture de l’olivier par des primes, mais c’est le contraire qui se produit et on la tue en accumulant des taxes énormes qui doublent le prix de revient.
extrait d'un texte publié en fin d'année 1952
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