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A sa création en 1986, l'émission s'appelait Ondes de choc et fut diffusée sur Paris Première et sur M6. A partir du 24 septembre 1989, le nom fut changé en Culture pub et la diffusion avait lieu le dimanche en fin de soirée, une émission culte de la chaine. 

 

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Comme son nom l'indique, l'hebdomadaire Culture pub dissèque d'abord la publicité. C'est là qu'on apprend que le Kleenex a été créé après la Première Guerre Mondiale par un fabricant de gaze et pansements qui, la paix revenue, a bien dû trouver une idée pour écouler son stock. C'est également dans Culture pubqu'on découvre des spots publicitaires où jouaient des personnalités alors peu connues: Miou-Miou et Roger Carel couchés dans le foin pour vanter les mérites du fruit défendu (le pruneau); Jean-Edern Hallier posant pour une marque de... caleçons, etc. L'émission lève encore le voile sur le travail alimentaire de cinéastes prestigieux: Miller et Molinaro (Mamie Nova), Beinex (Valentine, Fuji), Leconte (Caprice des Dieux)...

 

Surtout, Culture pub, avec un entrain hors du commun et sur un ton décapant, fait passer un message salutaire au travers de ses enquêtes journalistiques sur l'image et ses différentes utilisations. Anne Magnien, rédactrice en chef et présentatrice de l'émission avec le producteur Christian Blachas, s'explique.

- Il ne faut jamais oublier qu'une publicité sert à faire vendre un produit. C'est ce qu'on montre à Culture pub, dont l'idée de base est de construire un magazine de société à partir de la pub et de la TV. Ce sont deux éléments très représentatifs, de véritables miroirs d'une époque. La pub et la TV, qui ne sont pas des œuvres d'art, qui ne sont ni prophétiques ni subversives, ne font en fait que récupérer les tendances de l'air du temps.

 

Comme le souligne Anne Magnien il ne faut pas être dupe: la télévisionne vise pas, ou plus, à offrir des spectacles à un public, mais bien à offrir un public à des annonceurs!

- Oui, le business est partout, dans l'art, dans l'idéologie, dans la religion, dans le plaisir, dans la bouffe... Tout a désormais été pénétré par le business, et il n'y a pas de business sans communication. Culture pubs'applique à démontrer aux gens comment les mécanismes de la communication influencent, voire manipulent leur vie de tous les jours. Chaque sujet de l'émission est choisi en fonction de ce qu'il peut déboucher sur un problème plus ample donnant une ouverture sur la vie. Quand on parle des produits light et du business des vieux, les implications sont évidentes. Quand on a évoqué la guerre commerciale que se livrent Nike et Reebok, ça renvoie à la façon dont les marques récupèrent le rap, les jeunes, le sport.

 

Reste que plus on regarde Culture pub, plus on se dit que, dans le paysage audiovisuel, la publicité reste un des derniers espaces de liberté. Avis partagé par Anne Magnien.

- La pub est libre, oui, bien qu'elle soit énormément autocensurée. Les gens reconnaissent la publicité, ils savent très bien qu'elle va leur vendre du rêve, du plaisir, leur raconter une histoire. II n'y a pas de malentendu. Par contre, ce qui est bien plus inquiétant, ce sont les nouvelles tendances de la télévision, les "reality shows" et consorts. A la TV, les frontières deviennent de plus en plus floues entre l'info et le divertissement, de même qu'entre les images originales et les images reconstituées. Et ils'agit d'un flou volontairement entretenu! Dans la pub, on ment bien moins, les choses sont claires, les gens s'y retrouvent. Sauf qu'il y a maintenant une marque qui s'est engouffrée dans la brèche ouverte par la TV: Benetton. Avec les affiches provocatrices de Benetton, c'était la première fois que la pub se mettait à faire de la "trash" comme la pratique tous les jours la télévision. Mais quand la pub se permet cela, ça fait un scandale. Apparemment, on exige encore de la pub une moralité se situant bien au-delà de celle qu'on attend de la télévision. Ça protège la publicité, mais ça peut aussi restreindre sa liberté.

 

Diffusant régulièrement des pubs vétrangères, Culture pub révèle en tout cas que le pays où la publicité s'ébroue dans la plus grande liberté reste l'Angleterre. Aucune autre nation n'aurait osé ce spot vantant les vertus de la capote: on y montre M. et Mme Thatcher, M. et Mme Ceaucescu, M. et Mme Noriega, respectivement parents de Margaret, Nicolae et Manuel, avec ce slogan: "Si seulement ils avaient utilisé les préservatifs !"

 

N'empêche que des tabous subsistent. Ils ont encore cours dans nos sociétés, donc logiquement dans la pub (qui, répétons-le, ne précède rien). Exemple, qu'on verra ce dimanche: la couleur rouge, le sang, rares dans les spots de pub. Pour faire l'apologie du pouvoir d'absorption d'une serviette hygiénique féminine, on utilise des liquides colorés en bleu! C'est tellement évident qu'on n'y prend même plus garde. Mais Culture pub voit tout. A se demander si Anne Magnien et Christian Blachas ont recours à des sociologues...

- L'ennui avec les sociologues, c'est que si on fait appel à eux, il faut se taper des bouquins de 300 pages pour trouver à l'intérieur une vingtaine de lignes  utiles. En fait, il y a des gens formidables qui ont déjà fait le boulot pour nous, ce sont les publicitaires eux-mêmes, les gens qu'on rencontre. Pour faire vendre, ils doivent d'abord avoir observé la société, appris le langage, les habitudes, les spécificités des gens à qui le produit X est destiné. II n'est pas meilleur sociologue qu'un publicitaire!

 

Culture pub, qui prépare un sujet sur l'internationalisation de la pub et les problèmes que pose la conception d'une publicité devant plaire à des gens très différents, pense y évoquer, à la rentrée de septembre, le cas de la Suisse, de ses pubs créées à Zurich et traduites pour les Welsches et lesTessinois(*). Ce n'est donc certaine-ment pas en Suisse alémanique que l'émission trouvera enfin un "parrain" puisque, étonnamment, le magazine de la pub n'est pas sponsorisé...

 

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* Depuis le début de l'émission, selon Anne Magnien, seules deux marques ont refusé d'ouvrir leurs archives à "Culture pub": McDonald's et Sony

 

article publié dans un journal suisse, en mai 1992

 

 

 

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 citées dans l'article : quelques publicités provocatrices de Benetton 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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