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Voici Georges Tiret-Bognet, né le 15 janvier 1855, et un article de presse de 1934 le présentait comme le plus vieux peintre de Montmartre. Depuis l’âge de deux ans, il n’a jamais quitté la Butte. Il peignit son quartier, ses habitants, fut illustrateur dans des journaux, il fit les dessins du roman Famille Sans Nom de Jules Verne… Il est mort le 15 octobre 1935.

 

 

 

 

publié en 1937

 

 

publicité de 1939

 

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Les nouveaux jardins de la Butte Montmartre

 

article de Louis Bearud publié en 1927

 

M. Paul Bouju chez qui l'administrateur sévère n'a pas tout à fait tué le poète exquis et l'ami fervent de belles choses, estimera qu'il a bien rempli sa tache à la préfecture de la seine si la Ville de, Paris pouvait garder quelques jolis souvenirs de lui.

Et déjà nous n'oulierons pas que c'est M. Bouji qui présida à l'ouverture du boulevard Haussmann que c'est lui aussi qui fait-tous les efforts pour achever le Champ-deMars, les Champs Elvsées de la rive gauche ; il ne manque plus à sa gloire que d'inaugurer un jour le grand et beau jardin qui va se dérouler bientôt sur le versant sud de la hutte Montmartre.

Les Parisiens ont vu récemment s'élever sur la facade du Sacré-Coeur deux grandes statues de saint Louis et de Jeanne. d'Are et quelques-uns ont pensé que cela faisait partie de quelque programme municipal. Il n'en est rien. Ces deux statues ont été érigées par les soins de M. Hulot, architecte du Vœu national, l'organisation catholique qui a fait bâtir la basilique.

C'est l'aménagement des abords du Sacré-Cœur qui incomba à la Ville de Paris et principalement le grand jardin dont nous donnons une vue erspective' ci-dessus, et dont tes plans, dus à M. Bavière, architecte de la Ville, remontent à 1911 On avait pensé tout d'abord que ce jardin pourrait descendre jusqu'au boulevard Rochechouart, où il eût été prolongé ensuite par le square d'Anvers. C'était un projet grandiose auquel il fallut, hélas ! renoncer faute d'argent. Car depuis 1911 Il y a eu la guerre et ses conséquences. Mais le projet auquel on s'est résigné rdtt déjà fort beau et il a nécessité des travaux considérables pour consolider la butte Montmartre, qui est, on le sait, creusée de galeries et de carrières. Il fallut donc étahlir quarante six puits, d'une quarantaine de mètres de profondeur environ, et les remplir de ciment armé. Aujourd'hui ces gigantesques colonne souterraines soutiennent solidement la Butte.

Le nouveau jardin ira de la place Saint-Pierre (cote 79) au parvis de la basilique (cote 115.70). Il sera traversé vers son milieu à peu près par la rue Lamarck, à l'endroit môme où-se dressait la statue du chevalier de La Barre, qui va être placée dans le square Azaïs (à gauche sur le plan)

Un grand mur de soutènement a été bâti; il sera masqué par un ouvrage de pierre, garni de fontaines élégantes. De larges escaliers ont été construits, mais on pourra accéder jusqu'à la basilique à travers de petite chemins grimpants parmi des Jardins. Progressivement ces jardins seront ornés de grands arbres, notamment du côté du funiculaire, qui sera conservé, mais qui sera caché à la vue des promeieurs.

L'ceuvre à accomplir était consilérabîe. Elle fait honneur aux services d'architecture le la Ville de Paris, que dirige avec distinction M. Martzloff et qui compte les architectes éminents. Tous ont fait leurs efforts pour que ces travaux soient effectués dans les conditions les moins onéreuses pour les contribuables. La dépense totale ne dépassera pas 7 millions de francs.

On espère que les jardins seront complètement achevés rt livrés aux promeneurs au printemps de 1929. Ils constitueront un attrait de plus de notre capitale, où les exigences le la vie moderne ont causé tant de ravages.

Ajoutons que diverses statues, indépendamment de celles d'Azaïs et du chevalier de La Barre, seront placées dans les jardins, ainsi que quelques sculptures artistiques.

C'est là-dessus, désormais, qu'il faudra monter pour voir Montmartre, comme dit le chanson, et même pour admirer le superbe panorama de Paris.

 

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MONTMARTRE - PATRIE DU FRENCH CANCAN

 

"Il est minuit, Montmartre s'illumine." Ainsi commençait une chanson* d'avant-guerre, de l'époque où le "joyeux fêtard", le tube sur l'oreille, et une belle personne à grand chapeau et boa à chaque bras, remontait la rue Pigalle, gai comme un collégien à l'heure de la récréation. Il y a quelque chose de magique dans cette butte dont, la nuit, toutes les rues s'allument, qui laisse dans le ciel de Paris le halo de toutes ses lumières, de toutes ses enseignes au néon, dont les lettres s'inscrivent verticalement dans le sens de la pente de ses rues qui, le matin, s'endort, harassée de fatigue, tandis que, dans ses hôtels meublés, des girls américaines ou allemandes, des nègres dont le saxophone repose sur la cheminée avec la cravate de smoking, dorment jusqu'à trois heures de l'après-midi.

Pourquoi Montmartre et pas un autre quartier ? Sans doute à cause des chansonniers montmartrois du Montmartre fin-de-siècle, où habitaient les rapins, leurs frères, du Chat Noir de Salis, rue Victor-Massé, du cabaret d'Aristide Bruant, boulevard Rochechouart, ou du Moulin-Rouge, dont les ailes prolongeaient celui de la Galette. De toute façon, la butte Montmartre domine Paris, le jour par les poivrières blanches du Sacré-Cœur, la nuit comme un phare qui clignote et fait de l'œil à la ronde, de toutes ses lumières.

C'est gai, Montmartre, parce que c'est vivant et animé et il n'est pas douteux que jusqu'en 1999, date à laquelle, selon la vieille prédiction de Nostradamus, Paris doit être détruit de fond en comble — ce qui nous laisse tout de même un peu de répit — en ira à Montmartre pour s'amuser comme à la Sorbonne pour passer son bachot.

Et pourtant, que j'en ai vu mourir de jeunes firmes ! Que de noms, brillant en lettres de feu, ont laissé la place à d'autres noms ! Là où était l'an dernier une boîte russe, un cosaque devant la porte, il y a maintenant un cabaret viennois. Ici, des tziganes ont remplacé des nègres, ailleurs des jeunes gens en robe, des jeunes femmes en smoking. Mais ce qui ne change guère, ce sont les façades, où le vieux Parisien retrouve ses souvenirs, celle de Tabarin avec ses femmes de plâtre, celle de l'Abbaye de Thélème, celle du Pigall's, qui entourent la petite place où l'omnibus Pigalle-Halle-au-Vins rangeait ses chevaux blancs que remplacent maintenant les taxis de nuit, attirés par la lumière comme des papillons, quand la plaine Monceau et le faubourg Saint-Germain sont de vastes étendues silencieuses, jusqu'à la vieille inscription rue Pigalle : "Poste aux chevaux de Paris" du temps où la Butte était "extra-muros".

 

Il y a à Montmartre autant de boîtes de nuit que de maisons, sans compter les petits cafés et les petits bars qui restent ouverts pour les chauffeurs et pour toute cette population qui vit sur la Butte sous le signe de l'insomnie.

Acuellement, Montmartre c'est Tabarin, Florence ou Bagatelle, et O'Dett. C'est-à-dire la boîte à grand spectacle, la boîte "chic", et la boîte ou un joyeux lascar débite des gauloiseries, à la grande joie d'une assistance élevée bourgeoisement. Plus une boîte nègre très amusante qui s'appelle "Big Apple" et quelques boîtes russes. Mais il y a une quantité de constellations autour de ces étoiles de première grandeur.

Si la façade de Tabarin est restée la même, l'intérieur a bien changé. Appuyé au bar, long et ciré comme un bowling, où servent, à la mode hongroise, des barmaids plus jolies tout de même à regarder que des barmen, je pensais au vieux Tabarin du père Bosc, quand celui-ci répandait, du haut de son orchestre les valses et les polkas. Le cancan, hérité de la Goulue et de Grille-d'Egout, et immortalisé par Toulouse-Lautrec, était la seule attraction de ce Tabarin, attraction "mondiale", unique, montmartroise comme le kilt est écossais, et que les directions successives de Tabarin se repassent comme Un porte-bonheur.

Il leur porte bonheur, en effet, car c'est un succès. Pendant l'Exposition de l'été dernier, il y avait deux spectacles chaque soir. Chaque spectacle résiste en moyenne un an, nécessite deux ou trois mois de répétitions et de mise au point. Résultat : pour le directeur, une migraine de trois mois qui cesse quand le nouveau spectacle commence, et uniquement à la campagne dans une villa baptisée "le Cancan", bien entendu. C'est ce qui fait que le soir que j'y fus, tout le personnel avait le sourire et que, dans les coulisses, les girls étaient de bonne humeur : "Vous savez., le patron n'a plus sa migraine..!"

Toutes les tables sont occupées, retenues, réservées autour de la piste. Quant au premier étage, retenu lui en bloc par des agences de tourisme, il est occupé par des étrangers venus de tous les pays et qui "ont droit" dans leur forfait à cinq boîtes par soir. Ils restent une demi-heure au balcon de Tabarin, puis se croisent dans l'escalier avec un autre arrivage qui les remplace,, et ainsi de suite. Et comme ça toutes les nuits. Ce qui fait que vous pouvez commander une consommation en n'importe quelle langue et la payer en n'importe quelle monnaie, vous serez compris.

Le spectacle est très joli, monté avec la précision d'un mécanisme, sans accroc, sans raté et se déroule rapidement. Le corps humain en forme l'élément principal, le corps de fort jolies femmes naturellement, minces, musclées, sportives, telles que l'esthétique de 1938 l'exige. Les costumes sont réduits au minimum, bien entendu, mais ce minimum est luxueux et de bon goût. Les fraîches carnations, les belles attitudes, les jolis visages abondent, surgissent de partout, se renouvellent dans une accumulation de mille et une nuits blanches. Un costume à peu près complet surprend, et comme je remarquais avec surprise une jeune femme vêtue à la mode du XVIe siècle, ma voisine de tabouret, accrochée au bar comme la coquille au rocher, m'expliqua gravement :

— C'est Shakespeare junior.

Ce qui ne me rendit pas moins perplexe.

Un des clous de ce spectacle est formé par le corps de ballet qui, bras levés et tailles ondoyantes, suit le rythme d'un poème, œuvre d'un lyrique méconnu, qui mélange à la fois la mer, l'amour, la musique et la gloire, allez donc comprendre pourquoi. Tel quel, ce corps de ballet ondulant au rythme des alexandrins, semble un champ de blé agité par le vent. Gros succès. On en parlera longtemps à l'étranger, quand le touriste rentrera chez lui.

Pour permettre au public, émoustillé, de se dégourdir les jambes, il y a un entr'acte pendant lequel on danse.

Il y a ensuite une parodie di. journalisme, dans un journal où les rotatives sont représentées par un gymnaste qui fait le grand soleil à la barre fixe et où les n

Et naturellement la soirée s'achève sur le "french cancan" dont le nom déjà est sublime. Battue par les bas noirs lancés à toute vitesse, la mousse des jupons s'agite au-dessus de ces têtes charmantes aux yeux fixés par l'effort.

Pivotant sur un pied, comme une toupie, l'autre pied dressé à la hauteur de l'œil, ces jolies filles tombent dans un grand écart, ouvertes comme un compas. Il faut voir la tête des jeunes Hollandaises, Scandinaves ou Anglaises devant tant de gracieuse impudeur — jarretelles, pantalons, dessous nombreux — alliée à tant d'adresse. Dans le bruit des applaudissements, auxquels le personnel n'est pas le dernier à collaborer, l'un des directeurs me disait :

— Vous voyez cette jolie fille, celle qui tourne le, plus vite. Eh bien, on a dû l'opérer d'un rein. En partant pour la clinique, entourée de toutes ses compagnes, elle pleurait de ne plus pouvoir danser le cancan, car vous pouvez me croire, c'est éreintant... Eh bien, un mois après elle recommençait... Des filles comme ça, c'est introuvable.

Je veux bien le croire...

 

article publié en 1938

 

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* premières paroles de la chanson "L'Ame Des Violons"

 

 

La Goulue et Grille-d'Egout

 

 

 

 

 

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