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Paris-Roubaix est l'une des plus anciennes courses cyclistes, créée en 1896 après l'ouverture du nouveau vélodrome de Roubaix. Depuis 1966, elle ne part plus de la région parisienne mais de Picardie : de Chantilly de 1966 à 1976 et de Compiègne, depuis 1977.

 

 

 

Ci-dessous un article publié en 1996, année du Centenaire de Paris-Roubaix, mais dont c'était la 94e édition (à cause des deux guerres mondiales):

 

Paris - Roubaix fête son centième anniversaire. L' "Enfer du Nord", en réalité, ne fait pas tant référence aux souffrances des coureurs qu'au décor ravagé par la guerre, aux paysages bouleversés, à la région martyrisée que les chroniqueurs découvrirent en 1919 après la Grande Guerre. L'expression ne colle à nouveau à la course que depuis 1968, lorsqu'elle abandonna les routes nationales pour les chemins de traverse.

Il y a cent ans, Roubaix est encore la ville aux mille cheminées. C'est la grande époque du textile. Les usines tournent et les ouvriers travaillent dix heures par jour. Le dimanche est le jour du repos hebdomadaire, consacré à la messe, à la bière ou au sport. Paris-Brest-Paris a été créé en 1891, Bordeaux-Paris l'année suivante. Il y a cent ans, deux industriels (Maurice Pérez et Théodore Vienne) imaginent une course cycliste qui relierait la capitale à leur ville. Dans l'esprit de ses promoteurs, il s'agit d'une course d'entraînement à Bordeaux-Paris, quatre semaines plus tard. Cent aventuriers, alléchés par la prime de mille francs promise au vainqueur, se sont engagés dans la première édition de Paris-Roubaix. Mais ils ne sont que 51 à s'élancer, à 5h20 précisément, à l'orée du bois de Boulogne. Parmi les forfaits, Henri Desgrange, futur créateur du Tour de France et directeur du journal "L'Auto". Il y a cent ans, Josef Fischer est un coureur allemand qui a choisi la France pour résidence. Il s'échappe dans la côte de Doullens, manque d'être blessé par un cheval qui s'emballe, patiente à cause d'un troupeau de vaches sur la route. A 14h40, sous les acclamations, il entre sur le vélodrome et effectue les six tours de piste réglementaires. C'est Josef Fischer qui inaugure le palmarès. Devenu ensuite chauffeur de taxi, il devra regagner son pays à l'approche de la Première Guerre mondiale.

 

 

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LES ROUBAISIENS AURONT LEUR ARRIVEE DE PARIS-ROUBAIX


Tous les dimanches de Pâques, et cela depuis près de 40 ans, les populations de Roubaix et environs avaient la bonne fortune d’assister, sans bourse délier, à l’arrivée de la course Paris-Roubaix. Cette épreuve attirait à Roubaix une grande foule qui suivait avec intérêt l’épreuve cycliste pascale.


A l’origine, celle-ci se terminait au vélodrome situé aux confins du Parc Barbieux et, à la fermeture de celui-ci qui fut démoli par la suite, l’arrivée fut fixée avenue Gustave Delory. Il y a quelques temps, nous avons appris non sans émotion, que les organisateurs avaient, décidé de prolonger la course jusqu’à l’Hippodrome du Croisé-Laroche, et cette épreuve deviendrait ainsi Paris-Marcq en Barœul. L’Administration municipale de Roubaix, plus que tout autre, s’est émue fortement de cette suppression et dès qu’elle en eut connaissance, chercha immédiatement les moyens d’y remédier, afin de ne pas priver la population d’un spectacle qui était devenu pur elle une tradition, et le commerce local d’une recette qu’il pouvait escompter.

 

Une seule solution s’imposait et c’est d’ailleurs à celle-ci qu’elle s’arrêta : c’est l’orgnaisation par elle-même d’un Paris-Roubaix qui serait sous l’égide de l’Union des Sociétés Sportives et Gymniques du Travail. Le principe de cette course est actuellement adopté et nous pouvons annoncer que la dâte en a été fixée au dimanche précédant  Pâques, soit le 14 avril 1935. Elle coïncidera avec les fêtes organisées à l’occasion du Cinquantenaire de la Coopérative La Paix.


Nul doute que le monde sportif de Roubaix et environs applaudira vivement à cette initiative de la Municipalité roubaisiennes.


Article paru dans un quotidien régional en décembre 1934.

 

 

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HISTOIRE D'UNE LEGENDE

 

Année après année, cette course pas comme les autres répond encore et toujours aux vœux de ses instigateurs. A la fin du siècle, la piste cycliste du Parc Barbieux, à Roubaix, attirait la foule. La petite reine faisait les délices des Français. Filateurs dans le Nord, craignant la routine de l'exercice, Théo Vienne et Maurice Pérez s'inquiétèrent: "Les spectateurs en auront peut-être assez, un jour ou l'autre, de voir s'affronter des coureurs frais et pimpants. Il faudrait leur offrir le spectacle de routiers éreintés et couverts de boue." Bien vu, Messieurs!

 

Roubaix vaut bienune messe

L'opposition des associations catholiques de Navarre n'y changea rien. Pas question de courir le dimanche? On organisa une messe pour les coureurs, quatre heures du mat', Porte Maillot. Et l'on se mit en chemin: 280 kilomètres en ligne quasi droite. Deux grosses centaines sur une bande de terre jaunâtre, le reste de pavés tout plein de bonnes intentions... Un triomphe, un succès presque jamais démenti au cours des années. Au début, les téméraires champions étaient accompagnés par des tricycles à pétrole, puis des bagnoles. Puis plus rien. Le parcours a changé aussi. Aujourd'hui, on part de Compiègne. On arrive toujours à Roubaix, sur un vélodrome devenu lui aussi mythique. Maintenir ou non les secteurs pavés? Pendant longtemps, très longtemps, le débat a donné lieu à de vifs échanges. "Vous êtes tous des assassins!" avait lâché un directeur sportif italien, Nello Lauredi, à l'arrivée à Roubaix, en 1956. "S'il n'en tenait qu'à moi, je flanquerais un coup de goudronneuse sur tout ça!" assénait Bernard Hinault, qui détestait royalement "ça" et qui ne se faisait pas prier pour le faire savoir. Le pavé sournois, la gadoue, les chutes, le vent et les pièges innombrables de cette course sans fin, le Blaireau n'aimait pas. Mais il fut assez malin pour s'y présenter et pour gagner, en 1981, malgré deux gamelles. Une édition dantesque, des conditions exécrables. Sprintant sur un tour de piste complet, le Breton infligea ce jour-là un monumental k.-o. à ses cinq derniers compagnons d'aventure. Une "connerie", comme il le prétendait? Une "cochonnerie" ? Cette course-là ne mène pas en enfer, tout au contraire, Hinault-le-râleur le savait bien. Une place au palmarès est de celles qui vous assurent la pérennité!

 

Une légende se meurt

Aujourd'hui encore, nombre de cracks ignorent superbement la plus belle des classiques. Ils ont tort. Elle rayonne toujours plus vivement. Car ses pourfendeurs se sont tus. Le monde de la petite reine y tient. La France aussi. La question n'est plus de maintenir l'épreuve ou non, elle est désormais de sauver ce qui peut l'être de ces pavés maudits. 56 kilomètres encore en 1994, 49 cette année (peut-être moins, si une météo trop méchante exige un "adoucissement" pour la santé du peloton). Le héros de la course se meurt. Même si ses fidèles ont pu ranger les chemins les plus archaïques parmi les monuments historiques à préserver,le grand centre industriel nordiste continue de grignoter du pavé et les organisateurs (la Société du Tour de France) doivent continuellement lutter pour dénicher un tracé digne de l'enfer. La banlieue lilloise mange Paris-Roubaix. Les observateurs du cyclisme français s'accordent à dire que la course survivra encore dix ans, peut-être vingt. Il ne reste plus trop de places pour entrer dans la légende!

 

article de Christian Moser publié en 1997

 

 

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D'OU VIENT L'EXPRESSION "L'ENFER DU NORD" ?

 

Promis, on ne vous jettera pas le premier pavé si vous vous plantez, comme les héros dans la bordure... Des routes infernales, le crachin, les culbutes, le froid, la boue, les multiples crevaisons? Tout ça lui ressemble furieusement, en effet. Mais tout cela n'est rien, comparé à ce qu'ont vécu, ce qu'ont vu les coureurs de l'édition 1919, juste au sortir de la Grande Guerre.

 

La région que traverse le peloton, théâtre de nombreuses batailles, ravagée, désolée, donne l'occasion à la presse française de se déchaîner. "C'est à Béthune, lit-on dans "L'Auto" - qui est devenue "L'Equipe" par la suite - que la kulture boche commence à rutiler de son plus vif éclat." Le choc des mots et des images: "Un invraisemblable amoncellement de ruines", le "chaos", et Cambrin, "vaste champ de briques et de plâtras".

Plus loin, du côté de Mons-en-Pévèle, de Bouvines, là où les armées se firent face jadis, là où se situeront ce dimanche les secteurs pavés numéros 9 et 3 (on va dans l'ordre décroissant, le 3 sera donc plus près de l'arrivée), c'est "le champ de bataille, plus rien que la dévastation dans ce qu'elle a de plus affreux et de plus tragique: c'est l'abomination et la désolation. Pas un mètre carré qui ne soit bouleversé de fond en comble". C'est là, dans ce décor "de barbelés et de tranchées", qu'un journaliste parisien invente l'étiquette de la reine des classiques: "En tête, les frères Pélissier, dit le texte historique, à deux minutes Thys, Gauthy et Rossius, puis un groupe composé de Barthélémy, Michiels, Spiessens et Scieur. Les autres sont déjà loin. La bataille dans l'enfer du Nord est-elle terminée?"

Non, elle ne l'est pas! Elle fera rage dimanche. Comme ce 20 avril 1919, quand Francis Pélissier, "pour ne pas voir l'horrible spectacle des ruines qui sont à gauche et à droite, s'en va tout à coup à une allure infernale". Il a le regard noir, il ne veut plus rien voir d'autre que la "route". Il avale la Picardie. Il fait sauter le peloton, seul son frère Henri peut le suivre. Mais Francis, à force de faire gémir ses pédales, explose bien avant l'arrivée.

Thys, le Belge, et Barthélémy, revenu de très loin, rejoignent Henri. Un peu plus loin, ce trio stupéfie la garde-barrière: les trois hommes passent dans les compartiments d'un train à l'arrêt! A Roubaix, Henri Pélissier récoltera quand même les fruits des efforts de son frère. La course a remué la France, vaincu l'enfer. Et ce n'était pas celui qu'on croit.

 

article de Christian Moser publié en 1997

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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