article de Frédéric Maire publié en septembre 2003 :

 

Vous n'avez pas pu les rater. Ils se vautrent partout sur les étals des libraires, des kiosques et des supermarchés. Astérix, Obélix et Idéfix ont littéralement envahi la Gaule et l'Helvétie avec La rentrée gauloise, un nouvel album un peu particulier.

 

Astérix le petit Gaulois

Rappelons tout d'abord aux non-initiés qui ne connaissent d'Astérix que les films de Claude Berri ou Alain Chabat, et n 'ont vu que les comédiens Christian Clavier et Gérard Depardieu enfilés dans les mythiques braies gauloises, que le célèbre petit Gaulois et ses compagnons sont des personnages de bande dessinée, inventés en 1959 pour devenir les héros d'un nouveau magazine de BD , Pilote (Mâtin, quel journal !). Symbole français de la BD devenue adulte, Astérix incarne la quintessence de l'esprit (gaulois) nourri d'humour absurde à la National Lampoon et Mad (aux Etats- Unis), truffé de satire et de solides références historiques, politiques et sociales. Grâce à la plume ronde, incisive et toujours très efficace d'Albert Uderzo (qui dessina aussi, à part ça, les premières aventures de Tanguy et Laverdure, celles de l'Indien Oumpah-Pah et de Jehan Pistolet). Et surtout grâce aux scénarios brillants de l'un des meilleurs scénaristes que la France ait porté: René Goscinnv.

 

La mort de Goscinny...

Avouons le tout net: à sa mort, en 1977, autant Lucky Luke (aussi écrit par Goscinny) qu'Astérix se sont retrouvés orphelins. Et tous les albums qui ont suivi n'arrivèrent jamais à la cheville des précédents . Chaque fois, on ressentait tristement la pâle copie de recettes déjà éprouvées, comme un vin qui s'est éventé, comme un plat devenu froid. Car Astérix survécut tant bien que mal au décès de son scénariste. En 1989, peu après la fin du magazine Pilote, Albert Uderzo avait bien annoncé son intention de mettre fin à la série, après s'être séparé de son éditeur d' origine (Dargaud) pour fonder les éditions Albert-René, qui possèdent les droits des albums publiés ensuite et tous les droits dérivés du personnage (T- shirts, figurines, posters, films, etc.). Après un épuisant procès où le dessinateur et la fille de Goscinny accusaient les édifions Dargaud d'avoir dissimulé des recettes des albums d'Astérix en provenance de l'étranger, Uderzo s'était dit "épuisé" et entendait dorénavant "s'occuper à ne rien faire - et laisser à jamais le célèbre petit Gaulois se battre contre des fantômes de Romains.

 

... mais pas de ses personnages

Mais il n 'en a finalement rien été. Uderzo a continué, tant bien que mal, à réaliser seul des albums justement fantomatiques, sans passion, chargés de réminiscences du glorieux passé. Et cela jusqu'à aujourd'hui. Car même si cette parution en fanfare n'est qu'une vile et basse opération de marketing, ce nouvel album de la série a le mérite de nous surprendre. Il présente , réunies sauf erreur pour la première fois en album mis en vente, quatorze histoires dont une bonne partie a été écrite par... le regretté Goscinny. Petites histoires de commande (pour de la pub, pour des quotidiens américains, pour la candidature de Paris aux Jeux olympiques, ou tout simp lement pour animer les pages de Pilote), ces nouvelles originales permettent de constater combien Goscinny a apporté à cette œuvre... et combien son génie - à travers ses personnages - reste entièrement intact.