ACCUEIL | LE NORD ET UN PEU DE BELGIQUE | LE CURIEUX MUSEE ZOOLOGIQUE DU VIEUX GARDE DE MOUCHIN *

 

 

 

 

L’homme est né chasseur, nous disait hier un brave homme de garde privé, d’une des nombreuses forêts qui environnent Marchiennes.

 

Voyez le propriétaire de ce bois, nous disait-il encore ; la plus forte sensation qu’il éprouve c’est lorsqu’il contemple le gibier tué par lui. La plaine inculte, la forêt silencieuse, le marais tranquille, la cabane faite de branchages sont son domaine et c’est là qu’il aime vivre, attendant le gibier qu’il poursuit et avec lequel il lutte de ruse et d’adresse. Au crépuscule, devant les buches qui pétillent au milieu de l’âtre, il vide son carnier de ses trophées du jour et, aspirant encore l’odeur de la poudre, il admire avec extase son œuvre. Le lendemain matin, la fièvre de la battue de la veille le reprend dès que le jour se lève et le voilà reparti à l’aventure, en quête de faisans, de perdreaux ou de lapins : c’est toute sa vie.

 

Pour sa part, ce brave garde, M. Charles Fleury, de Mouchin*, compte de nombreux exploits cynégétiques à son actif ainsi qu’en témoigne le véritable musée zoologique qui orne sa demeure. Dans la maisonnette de M. Fleury, en effet, des centaines de bêtes, empaillées, étiquetées, classées avec goût, attirent l’attention des quelques rares visiteurs qui ont l’occasion de pénétrer dans cette habitation perdue, à l’orée du bois de Bercu. Toutes n’ont pas été prises dans les boqueteaux avoisinants nous assure le vieux garde Fleury, un octogénaire qui, depuis 46 ans, assure la surveillance des propriétés de M. César Varlet. L’aigle royal que vous voyez là, nous explique-t-il a été abattu il y a dix-huit mois dans les environs de Dunkerque par mon petit-fils Kléber Dhainaut. Les aigles Jean le Blanc, Balbusard (aigle pêcheur), le Gypaète barbu, dont l’envergure atteint presque trois mètres, m’ont été offerts par des amis.

- Des aigles dans nos bois ?

Ils sont rarement rencontrés, mais il en vient de temps en temps, ajoute M. Fleury et mon collègue Fernand Henno, le garde de M. Crespel de Genech en a tué un fameux l’hiver dernier. A peu près à la même époque, j’abattais cette buse et mon petit-fils tuait un Grand-Duc,  le plus fort, le plus redoutable des rapaces nocturnes. Ce dernier animal, très rare en France, mesure près d’un mètre et voisine dans l’armoire vitrée avec d’autres Ducs, hiboux plus petits, des éperviers de grandeurs différentes, un Chevalier Combattant, des buses encore, un milan noir, un milan royal, un busard Harpage, un busard Saint-Martin, une bondrée (sorte de buse), un héron, des canards sauvages, des faucons dont le vol rapide, le bec robuste, les ongles recourbés et acérés contribuent si puissament à leur donner la force, l’adresse et le courage. Voici encore un milan royal, un Kobes, une Cresselle, un Hobereau, des hiboux encore et toujours, un autour, des geais, une pie grièche, des oiseaux migrateurs : bécasses, bécassines, grives, cailles, oiseaux d’eau, des oiseaux provenant des pays chauds. Dans la partie basse des meubles, voici, enfin, les bêtes à poils de toutes espèces : loutres, blaireaux, fouines, putois, martres, écureuils, loirs, etc…


Tout ce que peut comporter un musée de zoologie est là curieusement rassemblé dans la petite et modeste demeure du vieux garde, cachée à la lisière du bois.


 

* Mouchin est un village du Nord, à la fontière belge sur l'axe Orchies - Tournai (B).


Cet article du journal L'Egalité de Roubaix-Tourcoing de 1931 permet de découvrir la faune de notre région au débit du XX° siècle.

 

 

 

 

 

 

 

 

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