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L’HISTOIRE D’UNE DUCASSE - LA DUCASSE DU BOIS DE GENECH

 

article publié en 1891

 

Tout le monde connaît nos ducasses flamandes : le pinceau des Van Ostade, des Teniers, des Metzys les a rendues fameuses dans le monde entier. — Quelle est l’origine de ces ducasses ?

Roquefort croit la trouver dans les fêtes patronales, et il base son opinion en particulier sur l’étymologie qu’il donne de ducasse; pour lui, en effet, ducasse vient du mot latin dux, (ducis, qui signiiie ordinairement chef, mais qu’on peut étendre sans trop d'effort à patron ; le patron est, en effet, le chef de la paroisse; la ducasse est sa fête. De plus, Roquefort donne des exemples de ducasses qui tombent le jour de la fête patronale. M. Hécart, dans son dictionnaire Rouchi-Français, fait venir, au contraire, ducasse de dédicace. Ducasse serait une contraction de dédicace. La ducasse serait l’anniversaire du jour où l’église de la paroisse a été dédiée, consacrée. Les deux opinions ne sont pas à l’abri de plusieurs objections de détail, auxquelles je ne m’arrête pas. Mais le grand reproche que je leur fais, c’est d être trop absolues, c’est de vouloir tirer nos ducasses toutes de la fête patronale, ou bien toutes de la dédicace de l’église paroissiale. La vérité, à mon avis, c’est qu’il y a des ducasses qui concordent avec la fête du patron, — Roquefort en cite, — et qu’il y en a qui ont été créées en l’honneur de consécrations d’églises. M. Hécart en connaît sans doute. Mais, j’ajoute qu’il y en a qui ont encore d’autres origines, qui se rapportent à d’autres faits. Et c’est de l’une de celles-là que je veux parler : la ducasse du bois de Oenech le jour de la Pentecôte.

Toutes les ducasses perdent chaque année de leur entrain et de leurs adhérents ; c’est une constatation devenue banale à force d’être répétée. Pourtant, dans le pays de Pévèle, pays éloigné des villes et par suite un peu en retard sur le siècle, ce délaissement de nos vieilles fêtes se fait moins remarquer, et les ducasses y sont encore courues, surtout celle du bois de Genech. Ainsi, les années où le temps la favorise, il arrive d’y rencontrer jusqu’à quatre et même cinq mille personnes.

Il est vrai qu’elle a des attraits particuliers : d’abord, c’est dans le bois qu’elle a lieu, et une promenade dans les bois, quand le printemps est dans toute sa beauté, peut séduire les personnes âgées qui évitent d’ordinaire le tumulte des ducasses; d’autre part, le bois est rempli de muguet; on va cueillir du muguet, et pour ce passe-temps fort agréable, paraît- il. ia jeunesse vient d< i bien loin à la "Fête au Muguet" (car notre ducasse est encore connue sous ce nom). Mais, je crois qu’à cet entrain que la fête au muguet possède encore, une autre cause n’est pas étrangère, et cette cause est la tradition qui y amenait nos ancêtres, la tradition attachée à son origine. Voici, en effet, cette origine; elle est d’ailleurs commune à la ducasse de Saint-Amand, qui a lieu également le jour de la Pentecôte.

En l’an 882 , les Normands remontèrent encore une fois l’Escaut, et ils désolèrent de leurs ravages ordinaires les contrées riveraines; mais devant Tournai, ils furent arrêtés; ils quittèrent donc leurs vaisseaux et se répandirent par petites troupes dans le pays.

L’une de ces bandes se dirigea vers Saint-Amand, où l’attiraient les richesses de l’abbaye d’Elnon. Les Amandinois se défendirent, mais leur résistance aggrava la fureur de ces barbares; ce qu'ils firent à Saint-Amand est abominable : ils enlevèrent tout ce qu’ils purent, puis ils mirent le feu à la ville. L’immense abbaye élevée par les enfants de Saint Amand périt tout entière. Quant aux moines qui tombèrent dans leurs mains, les Normands leur firent endurer des supplices épouvantables et les brûlèrent ensuite à petit feu ; il y en eut soixante qui moururent ainsi. Il y a quelques années, M. le chanoine Carlier fit peindre sur les murs de l’église de Saint-Amand l’affreux martyre de ces glorieux confesseurs.

Une autre bande de pillards se dirigea vers Orchies, Oreacastrum, comme disent les textes, qui était alors une cité puissante. A leur approche, les gens des campagnes s’enfuirent, en chassant devant eux leurs troupeaux.

Mais tous ne purent trouver place dans Orchies, et c’est dans le bois de Genech que ces malheureux se réfugièrent. Le bois de Genech était alors très étendu : il comprenait le bois du Fay et il s’avançait même jusqu’auprès des remparts d’Orchies. car Nomain n’existait pas encore; aussi, les fuyards y trouvèrent-ils facilement un asile impénétrable. Les Normands attaquèrent la ville d’Orchies et la saccagèrent, tandis que ceux qui s’étaient cachés dans le bois de Genech leur échappèrent.

Or, c’est, comme on sait, au retour du printemps que les Normands faisaient leurs excursions ; c’était donc à l’époque de la Pentecôte que tout ceci se passait.

A Saint-Arnaud, quand, une vingtaine d’années après, l’abbaye fut sortie de ses ruines, on institua une procession qui avait lieu le mardi de la Pentecôte, et qu’on célébrait encore au siècle dernier; c'est cette procession autrefois fort connue qui est l’origine de la ducasse de Saint-Amand.

A Genech, il se passa quelque chose d’assez analogue; le jour de la Pentecôte, les prêtres qui s’étaient réfugiés dans le bois y célébrèrent les saints offices, et la foule y assista. Les années suivantes, en reconnaissance de la façon merveilleuse dont Dieu les avait protégés, les habitants de la contrée retournèrent au bois de Genech ; ils élevèrent une chapelle à l’endroit où la messe avait été célébrée, et le moine de l’abbaye de Cysoing qui desservait Genech y vint chanter les vêpres.

A la veille de la Révolution, on y célébrail encore le salut tous les ans ; mais c’était alors le lundi de la Pentecôte, et ce n’était plus précisément en mémoire de la délivrance des Normands, mais à l’intention de la famille des comtes de Sainte-Aldegonde, seigneurs de Genech ; une note signée Lefebvre, curé de Genech, et datée du mois de février 1781, réclame pour ce salut, à M. le comte Alexandre, la somme de trois livres et quelques sols !

 

 

 

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JUIN 1954 - SUPERBE CORTEGE CARNAVALESQUE A LA FETE DU BOIS DE GENECH

 

La fête traditionnelle du Bois de Genech a attiré, comme chaque année, une foule considérable. Lundi*, dès 14 h. 30, le grand cortège s’organisait sur la Place. Vers 15 h. 30, il prenait le chemin du Château, au milieu du bois. En tête, venaient les cavaliers. suivi de l'Harmonie de Loison-sous-Lens. le char des Combattants Alsace-Lorraine, un groupe breton avec le Phare Breton, l'Harmonie de Templeuve. la Belle au Bois Dormant, le char de la Gymnastique, un mariage breton, le char des pompiers, les Pêcheurs, un groupe écossais, le cirque ambulant, l’Harmonie de Wannehain. la vie de Bohême, le char de la Musique, un groupe bourguignon et la Bourgogne, le char de l’Amicale, un groupe chinois par l'Union Musicale de Genech et, enfin, le magnifique char de la Reine du Muguet. Mlle Monique Leignel et de ses demoiselles d’honneur, Mlle Jeanne-Marie Legall et Mlle Odette Deroubaix.

Dans la cour du château, après l’arrivée du cortège, M. Octave Laurent, maire, félicita les organisateurs et les participants qui assurèrent le grand succès de cette fête annuelle. Il souhaita ensuite à la foule qui avait envahie toute la cour d'honneur du château, une excellente journée. Cette belle fête au profit des œuvres de la commune, se termina par un grand feu d artifice.

 

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* la tradition veut que la fête de Genech se déroule le lundi de Pentecôte

 

 

Un groupe de Bourguignons et, en dessous, une partie de la foule

 

 

le char de la Reine du Muguet

 

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