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L'Assemblée Législative proclame "la Patrie en danger". Le duc de Brunswick, généralissime des armées d'invasion, menace Paris de destruction totale si le roi est outragé.
La véritable réponse au manifeste de Brunswick fut la Marseillaise de Rouget de l'Isle. Un chant sortit de toutes les bouches; on eut pu croire que la nation entière l'avait composé : car, au même moment, il éclata en Alsace, en Provence et dans les plus misérables chaumières.
C'était d'abord un élan de confiance magnanime, un mouvement serein, la tranquille assurance du héros qui prend ses armes et s'avance; l'horizon lumineux de gloire s'ouvre devant lui:
-------------Allons, enfants de la patrie,
-------------Le jour de gloire est arrivé.
Soudainement le cœur se gonfle de colère à la pensée de la tyrannie. Un premier cri d'alarme, répété deux fois, signale de loin l'ennemi :
-------------Contre nous de la tyrannie
-------------L'étendard sanglant est levé :
-------------Entendez-vous dans nos campagnes
-------------Mugir ces féroces soldats ?
Tout se tait; on écoute et au loin on croit entendre, on entend, sur un ton brisé, les pas des envahisseurs dans l'ombre; ils viennent par des chemins cachés, sourds; le cliquetis des armes les annonce en pleine nuit; et par-dessus ce bruit souterrain, vous discernez la plainte, le gémissement des villes prisonnières. L'incendie rougit les ténèbres :
-------------Ils viennent, jusque dans nos bras,
-------------Egorger nos fils, nos compagnes.
Un grand silence succède, pendant lequel résonnent les pas confus d'un peuple qui se lève; puis ce cri imprévu, gigantesque, qui perce les nues : "Aux Armes !" Ce cri de la France, prolongé d'écos en échos, immense, surhumain, remplit la terre !...
-------------Aux armes, citoyens ! formez vos bataillons !
Et, encore une fois, le vaste silence de la terre et du ciel ! Et comme un commandement militaire à un peuple de soldats ! Alors la marche cadencée, la danse guerrière d'une nation dont tous les pas sont comptés. A la fin, comme un coup de tonnerre, tout se précipite :
-------------Marchons, marchons
-------------Qu'un sang impur abreuve nos sillons.
La victoire a éclaté en même temps que la bataille.
Edgar Quinet - Extraits
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Une emphase naïve, stimulée par le vin d'Alsace
1992 - LE BICENTENAIRE DE LA MARSEILLAISE
La France commémore le deux centième anniversaire de la Marseillaiseà peu près en même temps que celui de son entrée en guerre contre la coalition des couronnes européennes. Quelques semaines après que plusieurs personnalités parisiennes, dont l'abbé Pierre et Danièle Mitterrand, ont demandé qu'on change les paroles de l'hymne national français, au moment où l'on se propose de ratifier le traité de Maastricht, la coïncidence invite à méditer.
Au printemps 1792 donc, Rouget de Lisle compose à Strasbourg, lors d'une nuit fort imbibée de vin d'Alsace, un "chant de guerre pour l'armée du Rhin". La femme du maire, Mme de Dietrich, qui la chantera dès le lendemain, n'y voit d'abord qu'un "amusement", un chant de plus. En effet, l'époque se montre féconde en chansons populaires, sentimentales et martiales, où se conjuguent la fleur bleue, la vertu, l'idéal, la patrie et le sang, dans une emphase naïve qu'on retrouve sous la plume des ministres et des écrivains, à peu d'exceptions près dont la plus notable est Rivarol. Hervé Luxardo, qui vient d'écrire une "Histoire de la Marseillaise", en recense quant a lui trois mille dans les dix ans qui entourent la Révolution, d'Il pleut Bergère à Ça ira en passant par Cadet Roussel.
Sans qu'on sache très bien pouruoi (mais sait-on pourquoi Patrick Bruel plonge les minettes en transe?), la petite ariette guerrière, ornée de vers de mirliton, connaît un succès différent des autres. Et bientôt un destin. Imprimée dès juin 1792dans les journaux parisiens, elle se voit adopter par un bataillon de volontaires marseillais particulièrement turbulents. La voilà lancée, elle ne s'arrêtera plus jusqu'à nos jours. On la parodie, on en fait des pièces de théâtre, et déjà des polémiques: ce chant, qui devra tant à l'exécration des "boches", fut d'abord accusé d'avoir eu "un Allemand" pour père.
Ambiguïté native
Voilà deux mois, lorsqu'une mignonne fillette a entonné ce péan plein de fureurs et de "féroces soldats" dans le blanc cirque des Jeux Olympiques d'Albertville, les quels se voulaient une fête mondiale de l'air pur et de la fraternité sportive, beaucoup jugèrent le contraste choquant, ou au moins anachronique. A vrai dire, c'est peut-être une certaine idée de la France et de l'homme qui a montré alors, plus que sa désuétude, son ambiguïté native. Car, dès l'origine, mêlant la lutte "contre la tyrannie" à des bouillons de "sang impur", le. messianisme révolutionnaire que la Marseillaise chantait a suscité chez les peuples qu'il touchait des réactions successives, ou parfois concomitantes, d'enthousiasme et de haine. Voir l'Italie de Stendhal, ou Beethoven. En Europe, au tournant du XVIIIe siècle, les libérateurs et l'envahisseur ont le même drapeau: bleu-blanc-rouge. Les bourgeois chantent la Marseillaise dans de petits cénacles éclairés en attendant la chute des rois, ils l'entendent avec moins de plaisir sur les champs de batailles. Cela ne les empêchera pas de la reprendre, eux ou leurs fils, lors des nombreuses révolutions qui émailleront le XIXe siècle. Ainsi l'universalisme révolutionnaire fraie-t-il la voie d'un certain impérialisme français.
Chantée à Moscou, à Austerlitz ou au Caire, la Marseillaise entraînait au loin les poitrines dans une commune ardeur, pour faire oublier la guillotine de la Terreur, les colonnes infernales de Tureau, les noyades de Carrier, les fusillades diverses et les coups d'Etat variés. Telle est la vertu de la guerre étrangère: elle relègue au second plan la guerre civile. C'est une vieille tactique dont on mesure aujourd'hui encore les effets dans la controverse malsaine et biaisée que le prétexte Touvier ranime autour de l'histoire de Vichy. Cette tactique, la Révolution va l'utiliser à plein. Dans son désir de rénover entièrement la France, elle en avait en effet déchiré le tissu social et mental. (Notammentle manteau de l'Eglise catholique avec la Constitution civile du clergé et les persécutions massives). Le roi, symbole et garant de l'Unité de "ses peuples", repoussa, jusqu'aux limites de ses forces, la guerre, à laquelle enfin ses ministres le contraignirent, juste avant sa chute. Ici encore un changement de musique signale la nature de l'histoire. Le pacifique Louis XVI aimait qu'on salue ses Entrées par le Veni Creator, chant religieux, qui faisait alors fonction d'hymne national, et dont les premières paroles sont: "Viens, esprit créateur, visite les cœurs de tes fidèles...".
L'unité perdue
Est-ce vraiment un hasard si coïncident à peu près les journées de juin et d'août, les massacres de septembre, la chute du roi, la proscription du Veni Creator, la proclamation de la République, la déclaration de guerre à l'Europe et le succès de la Marseillaise? Au moment même où l'on ouvrait une guerre civile qui devait durer deux siècles, on la masquait par l'union sacrée contre l'ennemi, reflet mythique d'une unité désormais perdue. La patrie ne pouvait plus se rassembler qu'en armes. La Troisième République le comprendrait plus tard, qui multiplia les retraites aux flambeaux et les revues militaires à Longchamp. Aujourd'hui, le concept de nation, tel que l'a réduit et hypertrophié le XIXe siècle, a terminé depuis longtemps de miner les vieilles société seuropéennes; et même, il conserve ce qu'il en reste. Aussi les petits-fils des grands ancêtres l'ont-ils abandonné. Ce retournement fondamental a eu lieu voici un siècle environ.Quant Barrés et Mauriac ont récupéré la "Nation", qui fut l'idole des "patriotes" révolutionnaires. La Marseillaise a suivi cette évolution. La dernière fois qu'on a voulu la changer, c'était sous Mac Mahon, en 1878, parce que la droite lui reprochait de porter une idéologie de guerre civile. Et on l'a effectivement remplacée par une œuvre de Paul Déroulède, l'auteur du fameux Clairon. Aujourd'hui, c'est au tour de la gauche bien pensante de réclamer contre des paroles qui ont fait jadis son succès. Amusant retournement. Savoureux symbole.
Y a-t-il prescription?
Quant aux dites paroles, à force d'être ânonnées ou beuglées à la maternelle, dans les banquets et les tranchées par des générations successives, elles ont pris le poli des cailloux roulés par la rivière; sans doute, plus personne de bonne foi ne prête-t-il attention à leur sens. Elles expriment vaguement un vieil attachement à une terre et à ses rêves. On les a entendues de Verdun à Dien-Bien-Phu, de la Syrie au Tchad. Et si leur belliqueuse sottise était prescrite? Et si c'était l'air qui faisai tla chanson - la chanson par quoi, chacun le sait, tout se termine en France? La Marseillaise durera bien autant que la France.
Martin Peltier - avril 1992
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La Marseillaise - Rouget de Lisle (25 avril 1792)
Allons enfants de la Patrie, Le jour de gloire est arrivé ! Contre nous de la tyrannie, L'étendard sanglant est levé, (bis) Entendez-vous dans les campagnes Mugir ces féroces soldats ? Ils viennent jusque dans vos bras Égorger vos fils, vos compagnes !
Refrain : Aux armes, citoyens, Formez vos bataillons, Marchons, marchons ! Qu'un sang impur Abreuve nos sillons !
Que veut cette horde d'esclaves, De traîtres, de rois conjurés ? Pour qui ces ignobles entraves, Ces fers dès longtemps préparés ? (bis) Français, pour nous, ah ! quel outrage Quels transports il doit exciter ! C'est nous qu'on ose méditer De rendre à l'antique esclavage !
Quoi ! des cohortes étrangères Feraient la loi dans nos foyers ! Quoi ! ces phalanges mercenaires Terrasseraient nos fiers guerriers ! (bis) Grand Dieu ! par des mains enchaînées Nos fronts sous le joug se ploieraient De vils despotes deviendraient Les maîtres de nos destinées !
Tremblez, tyrans et vous perfides L'opprobre de tous les partis, Tremblez ! vos projets parricides Vont enfin recevoir leurs prix ! (bis) Tout est soldat pour vous combattre, S'ils tombent, nos jeunes héros, La terre en produit de nouveaux, Contre vous tout prêts à se battre !
Français, en guerriers magnanimes, Portez ou retenez vos coups ! Épargnez ces tristes victimes, À regret s'armant contre nous. (bis) Mais ces despotes sanguinaires, Mais ces complices de Bouillé, Tous ces tigres qui, sans pitié,
Déchirent le sein de leur mère ! Amour sacré de la Patrie, Conduis, soutiens nos bras vengeurs Liberté, Liberté chérie, Combats avec tes défenseurs ! (bis) Sous nos drapeaux que la victoire Accoure à tes mâles accents, Que tes ennemis expirants Voient ton triomphe et notre gloire !
Nous entrerons dans la carrière Quand nos aînés n'y seront plus, Nous y trouverons leur poussière, Et la trace de leurs vertus, (bis) Bien moins jaloux de leur survivre, Que de partager leur cercueil, Nous aurons le sublime orgueil, De les venger ou de les suivre
______________ P.S : le 7ème et dernier couplet, dont l'auteur reste à ce jour inconnu, a été ajouté en 1792.
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Aux armes et cætera - Serge Gainsbourg (à partir de La Marseillaise sur un air de reggae - 1979)
Allons enfant de la patrie Le jour de gloire est arrivé Contre nous de la tyrannie L'étendard sanglant est levé
Aux armes et caetera
Entendez-vous dans les campagnes Mugir ces féroces soldats Ils viennent jusque dans nos bras Egorger nos fils nos compagnes
Aux armes et caetera
Amour sacré de la patrie Conduis soutiens nos bras vengeurs Liberté liberté chérie Combats avec tes défenseurs
Aux armes et caetera
Nous entrerons dans la carrière Quand nos aînés n'y seront plus Nous y trouverons leur poussière Et la trace de leurs vertus
Aux armes et caetera
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