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Europa sur le dos du taureau blanc
Séduite par Zeus
L'histoire de l'Europe commence par une étrange histoire d'amour que l'on trouve dans la mythologie grecque, histoire dans laquelle le mot Europe fait pour la première fois son apparition. Il était le prénom d'une fille d'un roi de Phénicie (Liban actuel) assez jolie pour faire battre le cœur du roi des cieux, Zeus. Don Juan impénitent, celui-ci se déguisa en un magnifique taureau blanc et s'en alla brouter près de la belle un jour qu'elle se promenait dans la campagne. Attirée par son regard si doux, si tendre et la blancheur éclatante de sa peau, Europe s'approcha et se mit à le caresser. Le taureau s'agenouilla comme pour inviter la jeune fille à monter sur son dos. Ce qu'elle fit, l'imprudente! Aussitôt le taureau se releva, se mit à galoper, puis à s'envoler dans les airs. Terrifiée, la jeune fille se cramponna à ses cornes pour ne pas chuter. Zeus traversa la Méditerranée et s'en vint atterrir en Crète, où il reprit son apparence ordinaire. Et ce qui devait arriver arriva. Aucune mortelle ne peut décemment se refuser au dieu du Ciel. Europe devint ainsi une des nombreuses épouses de Zeus. Pourles Grecs, elle devint le symbole de la civilisation qui, du continent asiatique, gagna, parla Crète, leur continent. Ils donnèrent donc à celui-ci le nom d'Europe.
Conquise par les Romains
Si les Grecs ont bien perçu ce que leur civilisation devait aux civilisations du Proche-Orient, ce sont les Romains qui firent véritablement passer l'Europe de la Préhistoire dans l'Histoire, en la conquérant jusqu'au Rhin et au Danube dans les années précédant et suivant la naissance du Christ. Cependant, sous leur domination, l'Europe n'a pas d'existence propre. Elle fait partie de leur empire. Ses habitants ne se considèrent pas comme Européens, mais comme citoyens ou esclaves romains. Il faut attendre la chute de cet empire en 476, pour voir l'Europe commencer à se distinguer des autres régions du monde, à prendre son envol, à se lancer dans une extraordinaire épopée.
Envahie de toutes parts
Cette aventure débute pourtant fort mal. Pendant plus de 500 ans, tel un boxeur qui, sur le ring, en prend plein la figure, cette péninsule asiatique se fait plus d'une fois envoyer au tapis. En effet, ses habitants vont subir deux vagues d'invasions.
La première sera le fait de peuplades germaniques venues des plaines russes. Sous leurs coups de boutoir, elles enfoncent, au début du Ve siècle, la frontière du Rhin de l'empire romain. Et, par vagues successives, tantôt pacifiquement,tantôt violemment, elles submergent complètement l'Europe occidentale. En 476,le dernier empereur romain est déposé. Sur les ruines de cet empire, ces barbares, Francs, Belges, Scots, Angles, Alamans, Burgondes, Lombards, Vandales..., bâtissent une série de royaumes.
La seconde vague d'invasions frappe l'Europe du VIIe au XXe siècle. Elle est le fait des Arabes, qui, à l'appel de Mahomet (570 - 632), sortent de leur désert d'Arabie et se lancent à la conquête du "monde" en lui déclarant la guerre sainte. Après avoir conquis l'Afrique du Nord, ils traversent le détroit de Gibraltar et s'emparent d'une grande partie de l'Espagne. En 732, ils traversent les Pyrénées et tentent une percée en direction du royaume des Francs (France actuelle). Ils sont arrêtés à Poitiers par Charles Martel et ses Francs, aidés de nos ancêtres les Burgondes. Si Charles Martel avait raté son coup, il y a de fortes chances pour que l'Europe passât à l'Islam. Certaines de leurs bandes parviennent cependant à s'infiltrer jusque dans les Alpes et à s'y installer. En 921, on trouve l'une d'elles au Grand-Saint-Bernard, où elle terrorise les pèlerins qui se rendent à Rome. En 936, une autre pille l'évêché de Bâle. En 940, c'est au tour de l'abbaye de Saint-Maurice en Valais d'être saccagée.
Cette vague d'invasions est le fait également des Hongrois, du IXe au XXe siècle. Venus de l'Europe orientale, ces cavaliers sèment la terreur en Allemagne, en Italie du Nord, dans l'Est de la France et en Suisse. En 912, ils brûlent la ville de Bâle. Et, enfin, des Vikings, du IXe au XXe siècle. Venus du Nord de l'Europe, conduits par des chefs impitoyables et aux noms impressionnants, Eric la Hache Sanglante, Harald Dent Bleue, Ivar le Désossé, ils ravagent les côtes de l'Atlantique et de la Méditerranée, lancent des raids audacieux à l'intérieur des terres en Angleterre, France, Espagne, Italie, Europe orientale, pillant et rasant les villes et villages, terrorisant et massacrant les populations.
L'Europe féodale
Cet état permanent de guerre empêche les gens et les marchandises de circuler normalement. De plus, en prenant le contrôle de la Méditerranée (Chypre. Crète, Sicile.Baléares), les musulmans interdisent aux Européens de commercer librement avec l'Orient. La terre, dans cette Europe envahie, assiégée, devient alors la principale source de richesse que se disputent très souvent ceux qui détiennent la force armée, les seigneurs.
Envahie, assiégée, non seulement l'Europe réussit à se redresser au cours du Moyen-Age, mais, dès la Renaissance, elle part encore à la conquête du monde.
A la suite des Espagnols et des Portugais, dès le XVIIe siècle, Anglais, Hollandais, Français, se lancent à leur tour dans cette conquête. Belges, Italiens et Allemands les suivront au XIXe siècle. En 400 ans, forts d'un armement supérieur à celui des peuples des autres continents et forts d'une technique sans égal, les Européens se rendent maîtres d'une grande partie de la planète. Ces terres qu'ils occupent, soumettent et exploitent à leur profit portent le nom de colonies. A travers leurs banques, ils commandent la majeure partie des activités mondiales et la plupart des moyens de communications. A la veille de la première Guerre mondiale, l'Angleterre qui compte une population de 46 millions d'habitants et un territoire de 315 000 km2, domine un empire de 33 millions de km2 et une population estimée à 450 millions d'habitants, soit le quart de la population mondiale. Cette expansion de l'Europe est l'un des faits les plus importants de l'histoire de l'humanité. Il a fortement contribué au mouvement d'occidentalisation — à divers degrés certes — de tous les continents et à leur pillage par ce même Occident. Seules deux puissances échappent à leur suprématie: les USA qui se rendent indépendants de l'Angleterre en 1783 déjà et le Japon qu'aucune puissance européenne ne réussit à conquérir.
"Y en a point comme nous! "
Cette suprématie développe chez les Européens deux sentiments complémentaires et qui se renforcent mutuellement:
- un sentiment de supériorité vis-à-vis du reste du monde. "Coloniser, c'est se mettre en rapport avec des pays neufs pour profiter des ressources de toute nature de ces pays, les mettre en valeur dans l'intérêt national, et en même temps apporter aux peuplades primitives qui en sont privées les avantages de la culture intellectuelle, sociale, scientifique, morale, artistique, littéraire, commerciale et industrielle, apanage des races supérieures. La colonisation est donc un établissement fondé en pays neuf par une race à civilisation avancée, pour réaliser le double but que nous venons d'indiquer" Mérignhac, Précis de législation et d'économie coloniales, fin XIXe siècle.
- un sentiment de fierté, d'orgueil collectif national incommensurable et de mépris tout aussi abyssal vis-à-vis de toutes les autres nations. Ce sentiment qui habite nombre de Français à cette époque est exemplaire. "On peut dire que dans le monde moderne les Français sont encore les représentants éminents, et peut-être les seuls de la race chevaleresque... et que les Allemands sont les représentants éminents, et peut-être les seuls, de la race des dominateurs. Et c'est pour cela que nous ne nous abusons pas quand nous croyons que tout un monde est intéressé dans la résistance de la France aux empiétements allemands et que tout un monde périrait avec nous. Et que ce serait le monde même de la liberté" Péguy, Notre Patrie, 1905.
Mais tout a une fin...
Durant la seconde moitiédu XIXe siècle, ces deux sentiments génèrent une compétition, une rivalité de plus en plus vives entre ces nations colonisatrices, et cela dans tous les domaines, aussi bien en Europe que dans le reste du monde. Par deux fois, de 1914 à 1918 et de 1939 à 1945, cette rivalité dégénère en conflits qui d'européens deviennent rapidement mondiaux. Dans le premier conflit, l'Europe perd dix millions d'habitants, dans le second trente. En 1945, l'Europe se retrouve au tapis, ruinée, dominée par deux nouvelles puissances qui lui imposent leur loi: les USA et l'URSS. C'en est fini de sa suprématie.
Enfin sages
Mais les Européens, qui rêvent de retrouver leur grandeur et leur puissance perdues, réalisent qu ils n'ont qu'une seule issue: faire un trait sur tout ce qui les a dressés les uns contre les autres durant des siècles et mettre leurs forces en commun. C'est la condition sine quanon s'ils entendent retrouver leur place dans ce monde d'après-guerre qui se reconstruit et dont le poids économique se déplace des rives de l'Atlantique sur celles du Pacifique. Cette réflexion est le fait avant tout des Européens de l'Ouest. Ceux-ci pensent que la voie la plus sûre est de s'unir d'abord surle plan économique. Ils créent, en 1951, la C.E.C.A,la Communauté européenne du charbon et de l'acier, puis en 1957, la C.E.E. ou Marché commun et l'Euratom. L'élan est donné, mais le poids du passé, de la suspicion, de la fierté nationale est tel que cette union se construit, cahin-caha, en connaissant des hauts'et des bas, tant économiquement, qu'intellectuellement et politiquement, malgré son hétérogénéité. Pour la première fois dans l'histoire des peuples, des Etats libres et souverains — six entre 1951 et 1972, neuf entre 1973 et 1980. douze entre 1973 et 1995, seize dès 1995 — s'engagent dans une sorte de destin commun.
article de François Zosso publié en 1996
18 avril 1951 - Création de la CECA - de gauche à droite : Paul Van Zeeland (Belgique), Joseph Bech (Luxembourg), Joseph Meurice (Belgique)
Carlo Sforza (Italie), Robert Schuman (France), Konrad Adenauer (Allemagne), Dirk Stikker et Jan Van Den Brink (Pays-Bas)
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