ACCUEIL | L'HISTOIRE | 1891 - GREVE SANGLANTE A FOURMIES (NORD)

 

 

 

 

 

 

 

Gravure parue dans L'Illustration du 9 mai 1891, avec la légende suivante : "Après la fusillade, dessin d'après nature, par notre envoyé spécial M. de Haenen."

 

 


LA TRAGIQUE FUSILLADE DE FOURMIES, LE 1er MAI 1891

 

La grève, le mot ne date guère que du XIXème siècle. Mais la chose existait déjà dans la plus haute antiquité. De tous temps, en effet, on s'en doute, il y eut des travailleurs mécontents de leur sort et qui "manifestèrent", en se croisant les bras, pour faire triompher ce qu'ils n'appelaient pas encore leurs revendications.

...

Jusqu'en 1884, toute association d'ou vriers devait rester illégale. C'est WaldeckRousseau qui, à cette date, fit voter la loi qui autorisait la constitution des syndicats et légitimait leur action. Est-il besoin de rappeler toutes les luttes, parfois si meurtrières, que devait susciter cette action ?

 

Nos pères n'ont pas perdu la tragique mémoire des sanglants incidents dont fut le théâtre, en 1891, la petite ville de Fourmies, dans le Nord. C'était un premier mai, mais un premier mai auquel les patrons de l'industrie textile du lieu ne voulaient reconnaître aucun caractère particulier. Les ateliers restant ouverts, tous les ouvriers absents de leur travail ce jour-là devaient être congédiés. Les organisations syndicales n'en maintiennent pas moins l'ordre de grève, et préparent leur cortège, tandis que la municipalité, à l'instigation des chefs d'entreprises, demande l'assistance de la troupe.

Dans la nuit du 30 avril, plusieurs compagnies du 145* de ligne occupent Fourmies. Au soir d'une journée tendue, une colonne de manifestants conduite par un adolescent qui porte un drapeau arrive sur la place centrale de la cité. Les fantassins les attendent l'arme au pied. Sur un ordre de leurs officiers, ils ouvrent le feu. C'est la panique, le reflux massif des grévistes aux rangs desquels se sont mêlés les femmes et les enfants, et qui courent sous la mitraille. Quand le dernier a disparu au dernier coin de rue, on ramasse sur le pavé 7 morts dont trois femmes et le jeune porte-drapeau.

 

C'est encore un premier mai, en 1906, après une violente campagne de la C. G. T. nettement révolutionnaire pour la journée de huit heures, une première édition de la grève générale que le siècle va multiplier, Paris en état de siège, des bagarres partout, en province comme dans la capitale. Un mort, de nombreux blessés, tel est le sombre bilan par quoi s'ouvre une année qui ne connaîtra pas moins de 1309 grèves partielles.

 

C'est en 1908, le 30 juillet, là grève (les travailleurs du bâtiment à Draveil, où la troupe, assaillie à coups de pierres et de revolver, doit à son tour faire usage de ses armes. 3 morts, 20 blessés.

 

C'est, le 12 mars 1909, la grève au bureau des P. T. T, où le préfet de police lui-même est blessé.

 

C'est en octobre 1910, la grève générale des" cheminots que le président Briand mobilise, sur place. Occasion nouvelle de violents incidents, sabotages, bagarres, des morts encore et des biessés dans les départements comme à Paris.

 

C'est, après la guerre, la trouble journée du 1" mai 1919 avec son triste cortège d'incidents multipliés dans tout Paris, les rudes mêlées de la Bourse du travail et de la rue Albouy, au cours desquels un manifestant est tué, 80 agents blessés. C'est le 27 juillet 1922, la grève des dockers du Havre avec ses barricades, ses blessés encore et ses morts.

 

C'est le 1er mai 1923, une fiévreuse soirée qui voit tomber, poignardé par un assassin anonyme, un gardien de la paix.

 

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extraits d'un article publié en 1938

 

 

 

 

 

LES ÉVÉNEMENTS DE FOURMIES

 

"En tête (du cortège), une jeune fille de dix-huit ans, Maria Blondeau, tenait en chantant une branche de gui au-dessus de sa tête. Le commandant Chapuis ordonne de tirer. Ainsi que d'autres, Maria Blondeau tombe sous les balles ; elle a tout le haut du crâne emporté. Au bruit de la fusillade, l'abbé Margerin, le curé de Fourmies, accourt. Il emporte dans ses bras une jeune fille de dix-sept ans; puis il s'avance vers la troupe et supplie le commandant Chapuis de cesser le feu : "Ah ! je vous en conjure, ne tirez plus, voyez ces cadavres..." Et le commandant répond : "Je ne demande pas mieux."

 

Édouard Dolléans. Histoire du mouvement ouvrier.

 

 

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Les fiancés du Nord

 

Ils étaient du même village

Ils s’aimaient tous deux tendrement

De s’unir par le mariage

Tous deux s’étaient fait le serment

Le gars, travailleur énergique,

Comme son père était mineur

Elle, ouvrière de fabrique,

Pour tout bien n’avait que l’honneur.

Elle était jeune et belle

Il était grand et fort

Chacun se les rappelle

Les fiancés du Nord (bis)

 

Quand ils passaient devant l’église

Tous les deux relevaient leur front

Lui, murmurait à sa promise :

C’est là que nous nous marierons

Si tu veux, Pierre, ajoutait-elle

Ce sera pour le mois de mai

Mois où la nature est si belle

Où tout dans l’air est embaumé.

Si tu veux, disait Pierre,

En l’embrassant bien fort

Qu’ils étaient beaux, naguère,

Les fiancés du Nord.

 

Avril vit la fin de leur rêve

Adieu, les beaux jours sont finis

Voici, soudain, qu’un vent de grève

A soufflé sur tout le pays

L’homme, l’enfant, même la femme,

Fatigués de trop durs labeurs

S’arrêtent et chacun réclame

Les justes droits des travailleurs

Dans ces jours de tristesse

Que leur importe l’or ?

L’amour est la richesse

Des fiancés du Nord.

 

 

Il rayonnait comme une aurore

Le premier jour du mois des fleurs

Ce jour où la France déplore

Le plus grand de tous les malheurs

Devant l’église, dans la foule,

Ils étaient dans les premiers rangs !

La poudre parle, le sang coule

Et tous deux tombent en expirant.

Oh! sinistre hécatombe

Que chacun pleure encor

Les voilà dans la tombe

Les fiancés du Nord.

 

Le lendemain, la foule entière

Suivant les parents en grand deuil

Accompagnait au cimetière

Ceux qu’avait unis le cercueil

Les pinsons à la voix sonore

Roucoulaient des sons éclatants

Et partout on voyait éclore

Les premières fleurs du printemps !

Elle était jeune et belle

Il était grand et fort

Chacun se les rappelle

Les fiancés du Nord.

 

Paroles : René Esse Musique : Gaston Maquis

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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