Si "La fureur de vivre" de Nicholas Ray est devenu le film le plus mythique de James Dean, c'est sans doute à cause de l'étonnante similitude de destin qu'il y a entre Jim, le héros du film, et le comédien, qui connaissent tous deux une fin tragique dans un accident d'automobile. Ceci mis à part, James Dean n'avait rien en commun avec ce "rebelle sans cause" (titre original du film américain) qu'il incarna en 1955 à l'âge de24 ans avant de se tuer au volant de sa Porsche, le 30 novembre 1955, au lendemain des ultimes prises de vue de son dernier film, "Géant", sous la direction de George Stevens.

Né en 1931 à Marion dans l'lndiana, James Dean ne fut jamais un révolté. Fils unique d'un prothésiste dentaire et d'une fille de fermier, il fut élevé dans un climat familial débordant de tendresse. Toujours premier de sa classe, il éblouissait son entourage dès l'âge de cinq ans par ses dons pour le violon. Mais il n'a que huit ans lorsque sa mère est emportée par un cancer à l'âge de 29 ans. Son oncle Marcus et sa tante lui offrent un nouveau foyer. Eux aussi vont être subjugués par ce petit garçon plein de charme et de gentillesse. Ils lui passent tous ses caprices. Ils lui offrent notamment un cheval pour le jour anniversaire de ses 10 ans, lui font donner des cours de dessin et de musique et lui installent un terrain de hockey, avec des projecteurs pour pouvoir jouer de nuit. Il est vrai que le petit James est si gentil. Il chante des cantiques à la messe, et, s'il est déjà très doué pour imiter ses professeurs, il reste toujours partout le premier: en classe comme sur le terrain de basket. Timide et complexé par sa petite taille, James cherche à prendre une sorte de revanche dans tous les domaines. Très tôt, il est attiré par l'art dramatique et c'est dans ce secteur qu'il fait ses études à l'Université de Los Angeles. Bientôt il gagne New-York. Après quelques apparitions dans des films de cinéma et de télévision, on le voit sur scène à Broadway dans "See the Jaguar".

Il n'a que 23 ans lorsqu'il interprète au théâtre le rôle du jeune Arabe de "L'immoraliste", d'après l'œuvre d'André Gide. C'est là qu'Elia Kazan le remarque. Et aussitôt, le metteur enscène lui demande d'être Cal Trask, le jeune révolté de "A l'est d'Eden", tourné en 1955. En un an, avec trois films, il connaîtra la célébrité et la mort. Lorsqu'il disparait, c'est toute la jeunesse d'un pays qui est en deuil, tant elle s'est identifiée à son héros. Ses obsèques déchaînent une véritable hystérie qu'on ne peut comparer qu'à celle qui s'empara des admirateurs de Rudolph Valentino, lors de la mort de ce dernier en 1926. Ce charmeur, lors du tournage de "Géant", avait réussi à subjuguer jusqu'à la capricieuse Liz Taylor, qui avait compris que ce garçon farouche était en fait un très grand timide.

article publié en 1988