article publié le 26 juin 1997 :

 

L'océanographe français Jacques-Yves Cousteau est décédé hier à l'âge de 87 ans, a-t-on appris auprès de sa famille et des ses collaborateurs. Le commandant Cousteau "a rejoint le monde du silence et un grand hommage lui sera rendu à Paris", a annoncé son équipe dans un communiqué. Ses nombreux ouvrages et films documentaires, sa carrière aventureuse autant que son visage au profil d'aigle et sa silhouette svelte de grands portif avaient fait du Commandant Cousteau le Français le plus populaire dans le monde. Même les critiques qui lui furent adressées ces dernières années n'entamèrent en rien son crédit. A 87 ans, cet homme à la silhouette frêle coiffé d'un éternel bonnet rouge, qui laisse derrière lui plus de 110 films et des dizaines de livres, continuait de se dévouer au monde du silence. Même s'il déléguait de plus en plus aux membres de son équipe, le commandant Cousteau continuait de produire ses quatre films par an. Ardent défenseur de l'écologie, il étudiait les problèmes liés à l'environnement et à la surpopulation au sein du Conseil pour les droits des générations futures, créé auprès de la présidence française en 1993. En guise de protestation contre la reprise des essais nucléaires par le président Jacques Chirac, il avait démissionné de ce poste en septembre 1995.

 

Sur les océansavec la "Calypso"

Né le 11 juin 1910 à Saint-André-de-Cubzac (sud-ouest), engagé dans la marine, il devient capitaine de corvette. Inventeur avec Emile Gagnan, du scaphandre autonome automatique, breveté en 1943, il commande les campagnes océaniques du navire "Calypso" depuis 1952. Directeur du musée océanographique de Monaco de 1957 à 1988, il est le fondateur de la Cousteau Society (Norfolk, Etats-Unis), centre de recherches et de diffusion des sciences océanographiques. Cinéaste des fonds sous-marins, il a remporté de nombreuses distinctions avec ses films "Le Monde du silence", (Palme d'or à Cannes en 1956), "Le Poisson rouge", (oscar du meilleur court-métrage 1959), "Le Monde sans soleil", (Oscar du meilleur documentaire 1964). Il s'est fait connaître dans le monde par de nombreuses émissions de radio et de télévision, notamment par "L'Odyssée sous-marine du commandant Cousteau". Cousteau est également l'auteur de plusieurs ouvrages dont "Nos amies les baleines" (1972), "Encyclopédie Cousteau, le monde des océans" (1974), "L'Almanach Cousteau de l'environnement" (1981), "L'expédition Cousteau en Amazonie" (1985), "La Mer blessée" (1987), "La Mer de Cortès" (1988).

 

Elevé au rang d'«lmmortel"

Avec les années 80 viennent les honneurs et les affaires. Honneurs, avec notamment une élection à l'Académie française en 1988, et une recon-naissance mondiale lors du Sommet de la terre de Rio en 1992. Dans le même temps, des critiques donnent une image moins positive de l'action de "Captain planet". Fermé en 1992, le Parc océanique Cousteau des Halles est un gouffre financier, qui laissera une ardoise de 120 millions de FF aux banques. Le père s'était également brouillé avec son fils aîné Jean-Michel, alors que le cadet Philippe est mort dans un accident d'avion au Portugal en juin 1979. Son biographe français, Bernard Violet, met également en évidence le passé trouble de son frère Pierre-Antoine, rédacteur en chef du journal collaborationniste "Je suis partout" pendant la guerre, les mauvais traitements infligés aux animaux dans certains de ses films ou le manque de réalisations concrètes issues de ses travaux que contestent certains scientifiques. Il n'en reste pas moins que Cousteau restera comme l'homme qui a su replonger une bonne partie de l'humanité dans l'élément liquide. "L'avenir de la civilisation dépend de l'eau", rappelait-il en janvier 1997 en Floride. Son credo n'a jamais changé.