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C'était, jadis, un doux et charmant usage de célébrer chaque fête de l'année par un rôti traditionnel et un gâteau légendaire qu'arrosait gaîment un vin de gala.

C'est ainsi que la gauffre est, avec la crêpe odorante et trouée comme die la dentelle, la friandise obligatoire du carnaval. On en fait presque partout. C'est, dans nos campagnes du Sud-Ouest, une fête du foyer.

Sur les bûches qui flambent dans la cheminée, le gaufrier vénérable, graissé de lard fin, repose. Puis, comme la gueule d'un monstre, il s'ouvre pour recevoir la pâte légère, embaumant l'anis et la fleur d'oranger. Aussitôt, sur la flamme claire, on tourne et on retourne, au milieu de vapeurs odorantes, les fers retentissants.

La gaufre cuit, elle est cuite. Le gaufrier écarte ses lèvres de fer imprégnées de parfums, et la gaufre apparaît comme une plaque d'or ; et les enfants qu'une curiosité naïve attire vers la cheminée, contemplent, étonnés, les dessins bizarres, animal fantastique ou plante merveilleuse, que le moule imprime sur les gaufres fumantes.

Parfois, c'est un mot, un conseil, une devise gravée dans la pâte légère : "Espérance, Foi, Patrie."

 

Détachées du moule avec la pointe d'un couteau, les gaufres s'entassent dans une corbeille tapissée d'une serviette blanche. Elles sont plates et minces, rondes ou carrées ; mais parfois on les enroule vivement autour d'un moule en bois et, alors, elles forment un gracieux cornet que, par un raffinement exquis de gourmandise, on emplit d'une crème onctueuse embaumant la vanille.

La gaufre n'est pas seulement la pâtisserie consacrée du carnaval. Les confiseurs et les pâtissiers en fabriquent en toute saison. Elle est aussi la friandise populaire que "l'on crie" dans les squares et les fêtes foraines, et son odeur appétissante se mêle aux robustes senteurs des brioches et des galettes.

Toute fumante et coiffée coquettement d'un nuage de sucre fin, elle est très recherchée de la foule gourmande en contemplation devant les hercules et les femmes à barbe. Je crois même que la gaufre l'emporte, en succès culinaire, sur le beignet qui crépite dans la graisse, le pet-de-nonne qui s'arrondit en globe d'or et la crêpe ambrée qu'une jeune foraine en tablier blanc retourne, d'un geste souverain, comme si elle faisait sauter un ministère !

 

En cuisine savante, on confectionne des paniers de gaufres de l'aspect le plus charmant. Ces gaufrettes mignonnes sont enjolivées de petites roses en sucre, entremêlées de feuilles vertes en pâte d'amande. On dresse cette délicate et gracieuse pâtisserie dans un panier coquet, paré d'une serviette fine.

Jadis, la gaufre jouait un rôle poétique et curieux dans les cérémonies nuptiales.

En Touraine, par exemple, les nouveaux mariés échangeaient, en présence des convives, leur premier baiser d'époux sur une pile de gaufres fumantes et dorées.

Ces friandises légères étaient ensuite distribuées aux demoiselles de la noce, qui, à leur tour, offraient à la mariée des jacinthes et des roses. Ce charmant "baiser de la gaufre" n'est plus, aujourd'hui, qu'un souvenir de poésie et de foyer à jamais évanoui, comme tant d'autres souvenirs d'antiques coutumes et de douces légendes.

Mais la gaufre, aussi ancienne peut-être que la crêpe gauloise, déjà fameuse dans l'Auvergne de Vercingétorix, la gaufre est restée comme un dessert national dans la plupart de nos pays de France.

 

article de 1927

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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