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article publié dans un quotidien de 1975 :
DIETETIQUE : LA BIERE
La bière est légèrement nutritive : 100 g =35 à 65 calories environ. C'est une boisson assez faiblement alcoolisée (2 à 3% pour les bières faibles), mais le pourcentage monte à 6% et même 10% pour les bières fortes qui deviennent donc de véritables alcoolisées. La bière est une boisson qui présente une certaine valeur alimentaire, due à la présence de matières azotées, de sucre et d'alcool et à sa teneur en vitamines B. A faible dose (maximum 2 Iitres) la bière ne présente aucun inconvénient pour la santé et elle peut exercer une action stimulante sur l'estomac.
Mais à plus fortes doses, elle présente les mêmes inconvénients que toutes les boissons alcoolisées, sans compter les troubles dus chez les grands buveurs de bière, à l'ingestion exagérée de liquide (dilatation gastrique, troubles rénaux, etc.). La bière doit être supprimée dans les régimes amaigrissants. Quant à l'action de la bière sur la sécrétion lactée, elle est assez aléatoire. Néanmoins, la bière peut être conseillée aux nourrices (1 à 1 litre et ½ par jour).
article publié dans un quotidien de 1977 :
COMMENT SERVIR LA BIERE
Pour servir la bière, utilisez de grands verres bien dégraissés, lavés à l'eau chaude, rincés à l'eau claire, essuyés avec un torchon spécial : un verre gras ferait retomber la mousse.
Si vous voulez obtenir une mousse onctueuse et ferme, versez la bière d'un seul coup... Vous pouvez raffiner le service en coupant la mousse avec un couteau à bière.
Mais en principe la bière se verse en cascade dans le verre incliné, que l'on redresse quand il est à moitié rempli pour verser le liquide plus rapidement, même brusquement : on obtient alors une belle couronne de mousse.
en décembre 1954 on pouvait lire dans la presse l'encart ci-dessus
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Recette publiée en 1930
Un “homme du Nord”, donc un homme qui s’y entend, nous assure qu’il a une très bonne bière depuis qu’il la prépare en suivant cette recette :
Faire bouillir pendant trente minutes dans 15 litres d’eau : 50 grammes de houblon, 50 grammes d’orge, 200 grammes de sucre, un verre à bordeaux de vinaigre, une cuillerée à bouche de chicorée.
Le lendemain (quand le liquide est bien froid), tamiser soigneusement et mettre en bouteilles.
La bière est bonne à boire au bout de douze jours.
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publicité de 1933
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Un brasseur de Paris eut récemment l'idée bien opportune par ces chaleurs, d'organiserun concours de buveurs de bière, doté de quelques prix consistant également en liquides. En présence des Mariannes de Paris conviées à présider ce match original, huit concurrents s'affrontèrent.
Il s'agissait de vider, dans le moindre laps de temps, à l'aide d'un chalumeau, une chope contenant un litre de bière. Pour animer le jeu, le débitant avait eu soin de placer la table du concours en plein soleil, de sorte que les candidats attendaient avec une sincère impatience que leur soit apprtés les pots de bière.
Ils parurent enfin hauts et remplis jusqu'au bord d'une bière crémeuse, dans laquelle se plogèrent les chalumeaux. Puis, au signal donné par le chronométreur Massard, du Comité des Fêtes de Grands Boulevards, les concurents s'absorbèrent... dans l'absorption du frais liquide qui leur était offert.
Ni les clameurs d'encouragement, ni les rires de l'assistance ne leur firent lever la tête. Chacun aspirait... à être le vainqueur. Enfin, le premier qui eut vidé sa chope leva la main, 59 secondes après le départ. C'était M. Georges Boucher. Le deuxième, M. Henri Amard, terminait deux secondes plus tard.
publié en 1928
publictié de 1948
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LA BIERE
(article de Pierre Bonte pubié en 1953)
Le Nord et le Pas-de-Calais produisent annuellement 280 millions de litres de bière, soit 35 % de la consommation française. 90 % de cette production étant ingurgitée sur place, on en déduit que le Nord consomme chaque année 72 litres de bière par habitant.
Les 10 % restant sont expédiés sur Paris, sur Rouen, dans l'Est, le Midi, et aussi outre-mer, jusqu'à Tahiti et Saïgon. À La consommation de bière a diminué, dans le Nord, au cours de la guerre. Les Nordistes ne reconnaissaient plus leur boisson traditionnelle dans le pâle liquide qu'on leur vendait alors. Depuis. la consommation a repris lentement, sans rattraper le niveau d’avant-guerre.
La bière a pourtant atteint maintenant une qualité qu’elle n’avalt jamais connue. Raison : la substitution progressive à la fermentation haute de la fermentation basse, plus lente mais qui fournit une bière se conservant mieux.
Les bières de luxe sont fabriquées chez nous avec des houblons venant de Saaz et de Spalt (Tchécoslovaquie), ou d'Hallertau (Bavière). L'orge provient du Gâtinais. 30 % environ de la production des brasseries nordistes est consacrée aux bières de luxe.
Les bières de table sont faites à partir de houblons de Flandres et d'Alsace, et d'orges du Berry, de Champagne ou de la Beauce.
La bière était connue trente siècles avant Jésus-Christ en Extrême-Orient. On la fabriquait aussi à Babylone et chez les anciens Egyptiens, lesquels utilisaient le blé au lieu d’orge.
L’eau utilisée pour la fabrication de la bière doit être la moins calcaire possible. Elle ne provient pas de la Deûle ou de la Lys, comme on pourrait le craindre, mais de puits creusés sous la brasserie. Toutes les eaux du Nord conviennent a la bière.
A qualité égale, la bière se vend dans le Nord au prix le meilleur marché du monde entier. Elle y est à l’indice 129 par rapport à 1949. alors que son indice est de 148 dans les autres régions de France. Ce bas prix a pu être maintenu parce que la bière est chez nous une boisson de table, dont la consommation est régulière, quelle que soit la saison. Elle est d'autre part la boisson la plus demandée dans les estaminets.
La bière est taxée à raison de 203 francs pour 1.000 francs, tandis que le champagne ne supporte que 9 frs 60 de taxe pour une valeur équivalente Les brasseurs réclament une taxation identique pour la bière comme pour le vin.
Un litre d'eau minérale, qui n'a subi aucune transformation, coûte 45 francs. Un litre de bière de table, dont la fabrication a nécessité l'industrie que l'on sait, coûte de 35 à 40 francs.
Tirons l'échelle !...
L'eau n’est pas une boisson aussi inoffensive qu’on le croit généralement, a révélé un récent numéro du très sévère journal américain "New-York Herald Tribune". Il était bon que cette mise en garde soit enfin faite. On savait déjà qu’une seule goutte de ce liquide insipide, inodore et incolore, suffisait à troubler le meilleur pastis, mais notre excellent confrère prévient les buveurs d’eau de bien d’autres dangers :
"Ingurgitée en trop grande quantité, nous apprend - il, l'eau provoque des insomnies, des troubles intestinaux, des indigestions. Qui pis est. elle fait enfler les chevilles, gonfle tous les tissus où elle se réfugie et, malgré une diète sévère, provoque une augmentation de poids..."
Ah. mesdames qui n'osez pas boire de bière de crainte qu’elle ne vous fasse grossir, vous avez lu ? Comme l’eau est bien plus dangereuse !
Et le Journal américain n'a pas fini d'énumérer les méfaits de l’eau : elle favorise de multiples maladies de la peau (telles que zona, acné, impétigo et autres psoriasis). Glacée, elle est encore plus néfaste. Elle provoque alors un rétrécissement des vaisseaux de l’estomac et une baisse de la température interne. Tous ces maux sont occasionnés par l’eau absolument pure. Mais "l'eau naturelle n’est jamais pure, nous enseigne le Larousse. Elle tient en dissolution des gaz et des sels, et, en suspension,. des poussières et quelquefois des microbes. Ces derniers peuvent, par absorption, occasionner de graves désordres dans notre organisme et, notamment, servir de véhicule à la fièvre typhoïde". On connaît, d'autre part, les ravages du vin sur le foie qu’il réduit à l'état d’éponge rougeâtre, selon les illustrations si expressives des brochures antialcooliques. Inutile d’insister.
Que boire alors ? Mais... de la bière, puisque nous avons la chance d'être du Nord. La bière est saine, le Larousse nous l'affirme. Et le docteur Learoyd écrit, à l'appui de cette brève assertion : "Du point de vue microbiologique, c’est l’une des plus sûres boissons. Les méthodes de fabrication, l’acidité (PH 4,2) et les deux antiseptiques, alcool et houblon, tout cela en fait un milieu défavorable aux bactéries pathogènes". Et il ajoute : "Ce n’est pas comme cette dangereuse boisson, le lait, qu’on considère comme immaculé lorsqu’il ne contient que cinq millions de germes au centimètre cube..."
Non seulement la bière est inoffensive, mais elle est bienfaisante. Elle guérit, tandis que l’alcool tue : le docteur Waguemacker l’a déclaré dans une allocution prononcée au récent banquet des brasseurs du Nord. Et ses qualités diurétiques ne sont plus à vanter : les usagers de la bjère les ont toutes expérimentées. Grâce à elle, les méfaits de l'alcoolisme sont pratiquement ignorés chez nous. Les départements du Nord et du Pas-de-Calais, les plus importants consommateurs de bière de toute la France, sont justement ceux où la mortalité par alcoolisme aigu ou chronique est la plus faille.
Le "Britlsh Medical Journal" raconte les mécomptes de missionnaires qui, pensant contribuer à la lutte antialcoolique, croyaient bien faire en détournant leurs ouailles de la bière locale, et constatèrent que celles-ci commençaient à dépérir mystérieusement. Ils ignoraient simplement que cette bière était la seule source de vitamines B2 de leur alimentation nationale...
Car la bière est aussi une boisson nutritive. Ses noyaux minéraux nécessaires au métabolisme, sa valeur énergétique, ses vitamines diverses y contribuent. C’est un aliment en même temps qu’une boisson.
Enfin, la bière ne fait pas grossir les femmes, contrairement à l'eau... et à la légende répandue par les buveurs de vin dont nous connaissons la perfidie. Les deux pays antiques où l'on aima la bière ne sont-ils pas l'Egypte et la Grèce, où la femme atteignit les sommets de la beauté ?
D’ailleurs, de nos jours, les Anglaises boivent de la bière et restent minces. Regardez également les hommes de notre région, et tous les Nordiques, réputés buveurs de bière : ils ne sont pas bedonnants, rougeauds et graisseux, mais grands, minces, et d’allure sportive. Car la bière n’empâte que ceux qui en abusent outrageusement.
On dira que les Allemandes boivent de la bière et ne sont pas particulièrement sveltes. Mais, comme le fait remarquer l’écrivain Pierre Nord, qu est-ce que ce serait, si elles n en buvaient pas...
Ajoutons, en terminant, que la bière est "aussi" agréable à boire, et que les "crus" du Nord sont parmi les meilleurs de France...
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publicité de 1951
LA BIERE
(un autre article de Pierre Bonte pubié en 1953)
Avant d’être un homme du textile ou de la mine, le "ch’timi" est, pour l’ "étranger", quelqu’un qui aime la bière et les frites. Il suffit de se promener, narines frémissantes, aux alentours de la gare de Lille pour s’en convaincre. Encore qu’elle fasse vivre bon nombre de petits commerçants, la cuisine de la frite n’a pas encore pris le rang d’une industrie régionale...
Il en est tout autrement de la bière, qui a quitté depuis longtemps, chez nous, le mode de la fabrication artisanale ou familiale. La corporation des brasseurs existait au XIIIe siècle, et la grande industrie que nous connaissons alimente nos tables depuis cent ans déjà.
Heureusement. d'ailleurs ! Je me souviens encore de la bière qu'une mienne tante s'entêtait à fabriquer elle-même pour sa nombreuse famille... J'avais sept ou huit ans à l’époque. Et j’appréhendais 3 jours à l'avance l'annuel repas chez elle qui me contraignait à ingurgiter ce breuvage ignoble dont l'odeur prêtait à de fâcheuses comparaisons...
Je ne pouvais pourtant faire à ma tante l'affront de réclamer de l’eau. Elle était si fière de sa bière... et j'aimais si peu l’eau. Je ne pouvais non plus contredire ma mère qui se croyait obligée de féliciter chaque fois ma tante sur la succulence de sa bière.
Ah ! souvenir désagréable...
J ai perdu de vue ma tante, depuis le temps. Mais en visitant l'autre jour une importante brasserie lilloise je l'ai (presque) excusée de n’avoir pas réussi à nous servir une boisson plus agréable. La fabrication de la bière m'a paru chose si complexe ! Elle demande tant de soins et de temps, nécessite une telle installation...
Bien sûr, ma tante pouvait facilement se procurer l'orge, le houblon, la levure et l'eau qui sont les seules matières premières nécessaires à la fabrication de la bière. Mais ensuite ?
Il lui fallait faire germer l’orge, en la laissant mijoter trois jours dans l’eau, soumettre ces grains gonflés d'eau à une température tiède, puis les sécher sur un gril.
Le malt ainsi obtenu, qui contenait désormais du sucre au lieu de farine, à la suite d'une simple réaction, chimique, elle devait encore le broyer, le mélanger à l’eau de nouveau, de façon à dissoudre le sucre, puis filtrer ce liquide, devenu en langage technique du "moût".
Pour donner à la bière son parfum un peu amer, ma tante faisait alors bouillir le moût avec du houblon. Enfin elle y déposait le lendemain un peu de levure pour provoquer la fermentation qui transformerait le sucre en alcool et en acide carbonique.
Au bout de huit jours, elle obtenait un liquide mousseux, et je suppose que c'est cela qu’elle nous servait si gentiment. Je m'explique alors son goût amer. C'était inévitable.
Le brasseur-industriel, lui, outre qu’il a compliqué infiniment les opérations ci-dessus décrites en vue de parfaire la finesse de goût de la bière, ne considère pas celle-ci comme terminée au stade où nous la versait ma tante. Il la place alors dans de grands foudres d'acier ou d'aluminium où elle "mûrit" lentement, tout comme le vin. Elle s'y sature de gaz carbonique. C’est la période de garde.
Cette période est plus ou moins longue suivant la qualité de bière que l’on veut obtenir. Elle varie entre un mois pour la bière de table, et deux ou trois mois pour les spécialités.
C'est seulement cette < retraite » achevée que la bière est mise pn fûts ou en bouteilles, après avoir été filtrée à travers un papier spécial qui la rend brillante comme le cristal. Autrefois, on la mettait surtout en fûts. Mais de plus en plus, ce sont des bouteilles que réclame le client.
Pourquoi ? Les brasseurs se le demandent. Ils sont unanimes à déclarer que la bière en fûts est pourtant bien meilleure. Un bon demi se commande "sous pression!". II n’a pas alors subi toutes les manipulations de la mise pn bouteille, du capsulage, de l'étiquetage, de la pasteurisation, etc... qui risquent delui laisser un certain goût.
Sans compter que la bière en bouteilles revient plus cher, exigeant plus de main d'œuvre et de machines.
" Nous pourrions réaliser des prix beaucoup plus faibles, nous a dit un important brasseur, si l'on ne nous réclamait des contenances toujours plus petites. On en est à faire des bouteilles de 33 centilitres, et ce n'est pas encore suffisant. On nous demande maintenant plus petit encore!. C'est un non-sens. Cette exigence se retourne contre le client lui-même.
"Regardez le P'tit Quinquin de nos affiches. C’est une chope bien mousseuse qu'il brandit, et non une canette. Il sait ce qui est bon, lui !"
Que les familles achètent la bière de table en bouteilles, c’est normal. La pression d'un fût entamé diminue avec le temps et la bière perdrait vite de sa force. Mais à l'estaminet, non! Quel crime contre le bon goût, pour des gens du Nord...
Nous sommes descendus à la cave de la brasserie. Il m’a fait goûter, comparer, pour que je puisse transcrire ses paroles en toute connaissance de cause... J'eus de la difficulté à noter ce qu'il me dit ensuite...
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