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Les tailleurs de l'éternité


Amsterdam, capitale mondiale du diamant: en quatre siècles, la capitale des Pays-Bas s'est forgé une réputation en... béton en même temps que ses tailleurs polissaient les plus gros diamants du monde, tel le fameux "Koh-I-Nohr", ou le "Cullinan", de 3106 carats, le plus gros diamant jamais découvert. Le commerce proprement dit a pris son essor à la fin du XIXe siècle grâce à l'importante communauté juive d'Amsterdam et à la construction, en 1890, de la Bourse du diamant, le "Diamond Exchange". Les buildings ont remplacé aujourd'hui cet ancien haut lieu du diamant, mais l'histoire n'a pas oublié les premiers diamantaires.

 

Tout a commencé, au XVIe siècle, par l'arrivée à Amsterdam d'une foule de réfugiés persécutés par l'Eglise catholique. Juifs espagnols et portugais, Huguenots et représentants d'autres religions profitèrent de l'édit de Guillaume d'Orange leur accordant la liberté de croyance. Avec un bémol: la liberté d'exercer une profession était plus que théorique et le commerce était l'un des rares métiers autorisés. Dont le commerce du diamant, encore relativement jeune et bien connu des juifs espagnols et portugais: la science de la taille fut importée aux VIIe et VIIIe siècles déjà de l'Afrique du nord vers la Péninsule ibérique. De père en fils, d'oncle en neveu, la taille et le commerce du diamant s'étendirent, sortirent des murs d'Amsterdam pour tisser un réseau à travers toute l'Europe. Les métiers de la taille nécessitaient une grande précision et un long apprentissage: on comptait au moins six ans pour qu'un tailleur ou un polisseur maîtrise toutes les... facettes de sa profession. De nombreuses expressions juives faisaient partie du jargon des diamantaires. Elles sont encore utilisées aujourd'hui à travers le monde. Cet artisanat à domicile, sans la moindre machine et avec un outillage très précaire, n'empêcha pas la réputation des diamantaires d'Amsterdam de grandir. Grâce à leurs relations et à leurfamille, les marchands d'Amsterdam purent contrôler, dès 1725, la production complète du Brésil. Le commerce fut florissant jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, lorsque les mines brésiliennes furent entièrement exploitées. Amsterdam perdit peu à peu sa place de numéro un du diamant. Il restait bien peu, au milieu du XIXe siècle, de la cité florissante de 1750. Pauvreté et chômage firent leur apparition avant qu'on ne découvre en Afrique du Sud, vers 1870, d'énormes gisements de diamants. La ville connut une véritable renaissance et le commerce reprit de plus belle.

 

Force et fragilité d'une industrie uni-que très spécialisée: un parallèle s'im-pose avec l'horlogerie. Car même si cen'est pas le tarissement d'une source de matière première qui fut à l'origine de la crise horlogère, c'est bel et bien le manque de diversifcation qui laissa ici une région, là-bas une capitale, dans l'incapacité de surmonter la crise. La renaissance d'Amsterdam nécessita l'agrandissement des usines, le passage à la vapeur et le recours à nombre d'ouvrières. Leur toucher plus fin, plus délicat, convenait mieux que des mains d'hommes à la taille et au polissage des diamants. Les femmes constituaient en outre une main d'oeuvre facilement exploitable et peu coûteuse.

 

Ce fut le début d'un nouvel âge d'or: les salaires augmentaient, le commerce s'organisa, et la Bourse du diamant vit le jour en 1890. A cette époque, les échanges avaient lieu dans des cafés — on parlait alors de "café connection" — et dans des halls d'hôtels. Mais si ce business avait un charme certain, il ne pouvait plus continuer dans cette atmosphère désuète: une foule de commerçants se bousculaient au "Café Rembrandt", et cette confusion empêchait toute négociation sérieuse. Le bâtiment du «Diamond Exchange» fut construit au début du siècle et inauguré en 1911. Mais les guerres mondiales allaient entraîner des krach monstrueux et faire de ce marché entièrement ouvert un commerce tabou. Cahin-caha, de grèves en incendies, ce commerce déclina. Le chômage atteignit 50 à 60% - 10.000 personnes étaient employées dans l'industrie du diamant à Amsterdam en 1919 —, alors que la concurrence de la Belgique pressurait encore davantage le marché. Le krach de 1929 et la Grande dépression agirent comme un véritable coup de massue: le cours du diamant chuta, le marché s'effondra, et la récession fut terrible.

 

La reprise fut interrompue par la Deuxième Guerre mondiale et l'occupation allemande. Au début de la guerre, il y avait encore 60.000 carats de marchandise enregistrés. Les Allemands forcèrent les marchands juifs à leur en vendre 30.000 et en confisquèrent 20.000. La reconstruction fut lente et difficile. De 1000 tailleurs de diamants en 1947, l'effectif passa à 1600 en 1950, mais redescendit à 800 en 1953. Une industrie parallèle du diamant s'était créée en Israël. Une grève générale, en 1955, puis l'incendie du "Diamond Exchange", un an plus tard, aggravèrent la situation. Mais les années 60 furent plus fastes: avec l'élévation du niveau de vie, le diamant devint accessible à toutes les couches de la population. Les prix grimpèrent en suivant la demande. Le tourisme des "seventies" acheva de rendre à Amsterdam ses titres de noblesse. Aujourd'hui, les touristes peuvent visiter nombre de tailleries et découvrir le long processus de transformation de la pierre brute en un joyau irisé. Chaque année, ils sont 800.000 à profiter ainsi des visites guidées à l' "Amsterdam Diamond Center", chez "Van Moppers" ou dans d'autres tailleries. De l'"Emeraldeut" au "Brilliant" en passant par la "Marquise", la "Pear" ou l' "Oval", ils y découvrent les mille et une facettes de la taille. Et l'homme, dans cet art très difficile, n'a pas encore été remplacé par l'informatique. Eternité oblige.

 

 

article paru dans un quotidien suisse (1992).

 

 

 

 Sir Thomas Cullinan (1862-1936)

 

 

Diamond Exchange

 

 

Le diamant noir d'Amsterdam (33,74 carats), a reçu l'appellation officielle de The Amsterdam, il est un exemple de la maîtrise des diamantaires de la capitale des Pays-Bas

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