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La culture du blé remonte aux origines de l'agriculture. Sitôt qu'il eut compris le bénéfice qu'il pouvait tirer du travail de la terre, l'homme — l'homme méditerranéen du moins — a fait confiance au blé, qui devint par excellence, et pour des siècles, base de l'alimentation et synonyme de prospérité.
D'autres plantes — maïs, pommes de terre... — sont venues plus tard concurrencer le froment, et pourtant celui-ci n'a jamais cessé d'étendre son domaine, parallèlement au riz qui a joué un rôle analogue pour l'Extrême-Orient.
Qualités d'adaptation de la plante, valeur nutritive du grain et facilités de transport expliquent cette faveur particulière. De nos jours, le blé reste parmi les plus importants des produits agricoles et ceci en dépit d'une désaffection certaine des pays les plus évolués pour la consommation du pain : il entre dans la composition d'un grand nombre de produits alimentaires plus élaborés (biscuiterie, pâtes...), participe à la nourriture du bétail.
Enfin, il a pris dans les circuits commerciaux internationaux le rôle d'une véritable monnaie moyennant quoi certains pays industriels peuvent se procurer auprès des plus pauvres des matières premières indispensables à leur économie.
publié en 1965
article publié en 1930
PETITE HISTOIRE DU BLE
Pendant l’été dernier, qui fut chaud et sec nous avons eu la joie d’admirer des blés superbes ; c'est vraiment un spectacle merveilleux qu’un champ de blé aux mouvantes vagues d’or. On se dit : Voici le pain des hommes ! Voici le fruit de la terre le plus précieux. Des aliments naturels, c’est le premier ; car Dieu donna pour nourriture à nos parents Adam et Eve les céréales et les fruits. Apres sa faute, Adam, chassé du jardin d’Eden, fut condamné à travailler durement le sol, maudit à cause de lui: "C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain."
Plus tard, quand Noé, sorti de l’arche, rendit grâce à l’Etemel, celui-ci décida que l’homme serait désormais épargné : "Tant que la terre subsistera, les semailles et la moisson, le froid et la chaleur, l'été et l’hiver, le jour et la nuit, ne cesseront point".
Plus tard encore, le blé joue un rôle important dans l’histoire de Joseph, fils de Jacob et de Rachel. On sait que Pharaon vit en songe sept beaux épis et sept épis vides ; les épis maigres engloutirent les sept beaux épis... Joseph interpréta le songe prophétique ; il dit à Pharaon que sept années de famine allaient succéder à sept armées prospères. Afin de sau ver l’Egypte de la famine annoncée, Joseph fit des approvisionnements : "Il amassa du blé, comme le sable delà mer."
En effet, les Egyptiens nous ont laissé des preuves de leur savoir-faire ; dans des tombeaux vieux de trois mille ans, on a trouvé, peintes sur les murs, des scènes de la vie rurale. On voit les paysans labourer, semer, herser, moissonner le blé, puis le mettre en gerbes, le faire piétiner par des bœufs, manière de battage, et enfin mesurer le grain, le transporter à dos d’âne ou dans des barques.
En somme, la culture du blé est aussi ancienne que l’humanité. L’épi est l’un des ornements les plus familiers aux peuples primitifs. En France, notamment, des représentations d’épis peints ou sculptés ont été découvertes dans des fouilles et attribuées à nos ancêtres des temps préhistoriques. Les Gaulois cultivaient le blé, puisque César a écrit dans ses "Commentaires" qu’il trouva par toute la Gaule du blé pour nourrir ses légions.
Les anciens aimaient le langage des symboles, souvent personnifiés par les dieux et les déesses, et dans la légende de Cérès se retrouve l’histoire du bjé. Cérès est la déesse de l’agriculture; elle est fille de Saturne et de Cybèle, déesse de la terre ; on la représente tenant d’une main une faucille et de l'autre une gerbe. Elle est couronnée d’épis. Elle a auprès d’elle deux animaux utiles, le hibou et le lézard. Cérès parcourut la terre avec Bacchus, dieu de la vigne, afin d’enseigner aux hommes l’art ensemencer et de faire du pain: ceci est une allégorie qui signifie que le blé et la vigne poussent sous le même climat, c’est-à-dire sous un climat tempéré. Chez les Grecs, Cérès était appelée Déméter, et la fille dé celle-ci Perséphone (ou Proserpine). Les aventures de Perséphone sont multiples et, du reste, amusantes. Enlevée à sa mère pour être l’épouse du sombre Pluton, dieu des mers, Perséphone finit par obtenir de Jupiter quelle passerait six mois de l’année sur la terre auprès de Cérès. Proserpine symbolise le grain de blé qui passe l’hiver en terre et en sort au printemps.
Comme la plupart des céréales cultivées depuis un temps immémorial, le blé est probablement originaire de l’Asie occidentale. D’infinies variétés ont été obtenues qui ont chacune leurs qualités locales, Le blé occupe une place prépondérante dans l’alimentation du monde entier. La précieuse graminée est cultivée presque partout en France ; nous produisons surtout des blés au grain tendre qui fournit la meilleure farine pour la meunerie. Les blés au grain dur se cultivent sous les climats secs et très chauds, tels que ceux de nos colonies nord-africaines. Les blés durs d’Algérie sont très appréciés ; ils se plaisent dans les terres fortes des plateaux élevés, arrosés par les pluies d’hiver et de printemps ; leur grain est recherché pour la fabrication des semoules et pâtes alimentaires.
Les blés durs sont riches en gluten, matière albuminoïde très nutritive. On peut séparer le gluten en pétrissant un peu de farine sous un filet d’eau : l’amidon est dissous et entraîné par l’eau, et la matière jaunâtre, élastique, qui reste entre les doigts, c’est le gluten. Outre l’amidon et le'gluten, la farine de blé contient des matières minérales (phosphate et carbonate de chaux), de la cellulose, de la graisse, etc.
On donne le nom de froment au blé dont le grain est nu (dépouillé à maturité de ses enveloppes ou balles). Le grain, vêtu est appelé épeautre.
Le blé d’hiver se sème vers le milieu d’octobre par une température de 10 à 12°. Le blé de printemps se sème au début de mars. L’ensemencement du blé a reçu le nom d'emblavage. Le petit grain de blé semé dans la terre bien labourée sera enfoui par le hersage et, si le temps lui est favorable, le petit grain germe : on dit alors qu’il levé. Si l’hiver est trop doux, le blé pousse trop vite et tout en feuilles qui épuisent le sol et celui-ci ne pourra plus fournir les matières minérales nécessaires à la formation de l’épi. Il ne faut pas non plus que l’hiver soit trop rigoureux, quoique certaines variétés de blé résistent à des températures très basses. Mais les blés, même délicats, supportent les gelées s’ils se trouvent abrités par un manteau de neige.
Au printemps, le cultivateur procède au tallage et au binage (sarclage) des blés. La tige monte ; sous le climat parisien, l’épi se forme et fleurit en juin ; il est mûr à la fin de juillet.
Le blé a de nombreux ennemis, surtout une mouche appelée cécidomie. Le remède le plus efficace contre les déprédateurs consiste à protéger les petits oiseaux insectivores.
Quand le blé présente une tige sèche et jaune, il est bon à moissonner. Les machines le coupent et le mettent en gerbes dont on fait des meules jusqu’à ce que le blé soit sec. Les batteuses séparent le grain de la paille et finalement la récolte dorée est portée dans le grenier.
Les Français sont grands mangeurs de pain et, pendant longtemps, nous avons été obligés d’acheter du blé à l’étranger. Par bonheur, en 1929, la France a, produit une quantité de blé que l’on dit presquè suffisante à la consommation du pays. Et il est permis d’espérer qu’à l’avenir, grâce au perfectionnement des méthodes de culture, grâce à l’emploi judicieux des engrais, la France parviendra à se suffire en blé de façon régulière.
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On retrouva longtemps Cérès sur les timbres français "courants" (avant Marianne)
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publié en 1938
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